V. Tandis que mon oeil charmé parcourt à l’envi ces belles choses, revenant sans cesse de l’une à l’autre: Tout ce que vous voyez est à vous, me dit Byrrhène; et désirant m’entretenir en tête-à-tête, elle fit retirer tout son monde.
Quand nous fûmes seuls: Je tremble pour vous comme pour un fils, mon bienaimé Lucius, me dit-elle; j’en prends Diane à témoin. Ah! que je voudrais pouvoir écarter les dangers qui menacent cette tête si chère! Gardez-vous, mais gardez-vous sérieusement des fatales pratiques et des détestables séductions de cette Pamphile, la femme de Milon, que vous dites être votre hôte. C’est, dit-on, une sorcière du premier ordre, experte au plus haut degré en fait d’évocations sépulcrales. Elle peut, rien qu’en soufflant sur une pierre, une baguette ou quelque autre objet aussi insignifiant, précipiter les astres du haut de la voûte éthérée dans les profondeurs du Tartare, et replonger la nature dans le vieux chaos. Elle ne voit pas un jeune homme de bonne mine sans se passionner aussitôt. Dès lors, ni ses yeux ni son coeur ne peuvent se détacher de lui. Elle l’entoure d’amorces, s’empare de son esprit, l’enlace à jamais dans les chaînes de son inexorable amour. À la moindre résistance, elle s’indigne; et les récalcitrants sont tantôt changés en pierres ou en animaux, tantôt anéantis tout à fait. Ah! Je tremble pour votre sûreté. Gardez-vous de brûler pour elle; ses ardeurs sont inextinguibles, et votre âge et votre tournure ne vous expose que trop à la conflagration. Ainsi Byrrhène exprimait ses craintes.
15 août 2011
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