Mercredi 30 Juillet 2008
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Le pétrole bon marché, est-ce terminé? Pourquoi?
Ce n´est pas une question simple. L´inquiétude a ses racines loin, très loin dans l´histoire du monde quand il a voulu se développer, au seul bénéfice des conquérants et, pour ce faire, au détriment des besoins vitaux de l´humanité. Les prix du pétrole flambent, et en cet été 2008, les nantis même en souffrent, regrettant les époques grasses des colonies. Mais en réalité, le pauvre d´autrefois reste pauvre encore aujourd´hui. La pauvreté n´est pas seulement économique, voire physique, l´indigence d´esprit se cultive, ici et là, sous la pression de la force politique servie par la force mécanique.
Le livre Pétrole apocalypse d´Yves Cochet peut être utile à la réflexion, comme le souhaite l´auteur fort passionné d´écologie puisqu´il en est un ferme militant depuis plus de trente ans. Dans son livre, il y a une longue réflexion de l´homme politique, mais bien sûr une foultitude d´exemples servant la cause de l´écologie, montrant avec hardiesse et vérité combien notre planète et son peuplement pourraient pâtir des bouleversements déjà annoncés par l´épuisement des ressources du sol et de la consommation effrénée des matières productrices d´énergie.
Yves Cochet tire la sonnette d´alarme, écrivant: «Nous sommes dans le compte à rebours, nous n´avons pas une seconde à perdre. Il est déjà trop tard pour espérer transmettre à nos enfants un monde en meilleure santé que celui que nous connaissons aujourd´hui. Plus nous attendrons, plus leurs souffrances seront grandes et dévastatrices. Mais nous pouvons les réduire. L´urgence est là, mais l´espoir aussi. Si nous réagissons vite.»
Ce raisonnement n´est pas fallacieux, il est fondé sur un constat que beaucoup ont établi, mais hélas! aucune voix n´a encore ému tout à fait les grands dirigeants de ce monde qui se sent sur le chemin de l´anéantissement. Et pourtant, ces dirigeants, eux aussi, sont compris dans cette apocalypse programmée; ils en sont les responsables. Étrange conception de l´homme qui programme sa propre perte! C´est en quelque sorte «la part maudite» qu´il prend dans les richesses de la planète, ainsi que l´écrit Georges Bataille, cité par Cochet: «La détermination générale de l´énergie parcourant le domaine de la vie, est-elle altérée par l´activité de l´homme? Ou celle-ci, au contraire, n´est-elle pas faussée dans l´intention qu´elle se donne, par une détermination qu´elle ignore, néglige, et ne peut changer? J´énoncerai, sans attendre, une réponse inéluctable. La méconnaissance par l´homme des données matérielles de sa vie le fait errer gravement.»
Ainsi donc le pétrole mène le monde. C´est le problème du monde. Et pourtant le rêve continue, yeux ouverts sur le bonheur consommé sans le produire. Mais après le pétrole, à quel rêve de bonheur oserions-nous prétendre? Trop de bonheur: «De l´eau du robinet ou en bouteille»; «Nous rapportions [du marché] nos cabas pleins et remplissions le frigo»; «Nous aimions les voyages»; «Nous aimions les activités libres»; «Nous prenions le temps de vivre». Il faut se rendre à l´évidence… «Aujourd´hui, le temps n´est plus de notre société. Chaque jour qui passe nous rapproche d´un choc imminent que nous ignorons: la fin de l´ère du pétrole bon marché. Elle aura duré cent cinquante ans, elle s´achève. [...] Ce choc dont nous apercevons les prémisses provient de la coïncidence, en l´espace de quelques années, de trois situations inédites: une situation géographique, avec le déclin définitif de la production de pétrole; une situation économique, avec un excès structurel de la demande mondiale de pétrole par rapport à l´offre; une situation géopolitique, avec une intensification du terrorisme et des guerres pour l´accès à ce pétrole encore indispensable mais devenu décroissant. Un triple choc donc.»
La solution à ce problème est-elle viable? «Organiser la décroissance de la consommation et des échanges de matières et d´énergie, orienter l´économie vers une perspective d´autosuffisance décentralisée» et si même rêver, grâce à ces prises de décision, à la sauvegarde de «la solidarité, la démocratie et la paix», d´abord, est-ce possible? Ensuite, est-ce suffisant? Le bonheur est dans le pré, dit-on.
Et là encore, le pauvre est mis entre parenthèses, et la pauvreté continuera à sévir chez ceux qui auront tout vendu de leur «pétrole», de leurs «matières premières», de leur reste d´existence, – ce reste qui est leur âme et conscience. Aussi est-ce, peut-être, par la réflexion trop grande sur l´avenir des sociétés nanties d´aujourd´hui, et trop ignorante ou trop oublieuse de l´avenir des sociétés pauvres ou appauvries d´aujourd´hui que pèche le livre, pourtant très important et très vrai, Pétrole apocalypse d´Yves Cochet.
Pétrole apocalypse d´Yves Cochet
Casbah Éditions, Alger, 2007, 275 pages.
http://www.lexpressiondz.com/culture/le_temps_de_lire/56888-P%C3%A9trole%3A-r%C3%A9flexion-et-action-imm%C3%A9diate.html
13 août 2011
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