TLEMCEN : CONTES ET LEGENDES DE FOUDIL BENABADJI
Un hawfî du souvenir
Mercredi 14 Juin 2006
Par
A Tlemcen, les strophes chantées dans le jeu de la balançoire racontent-elles encore un temps heureux de la petite enfance?
Dans son livre Tlemcen dans l´Histoire à travers les Contes et légendes (*), Foudil Benabadji met «le terreau´ de Tlemcen». L´émotion est plus que grande, elle est poignante.
L´auteur, né en 1937 à Ben Badis (autrefois Descartes) et ayant vécu en France depuis l´âge de 18 ans pour faire des études supérieures, notamment dans les Sciences de l´Éducation, nous raconte la cité de Tlemcen, point par point, histoire, géographie, société. Ce sont des souvenirs d´enfance, restés intacts, et comme tels, ils nous intéressent à divers titres: c´est un temps que, peut-être, le temps d´aujourd´hui n´a pas conservé complètement et qui s´estompe peu à peu de la mémoire collective.
En fait, tant de choses ont changé, depuis l´Indépendance, tant de choses dont nous étions privés sous la colonisation et sont maintenant bellement une réalité. Mais aussi tant de choses aimées et respectées, jadis, n´ont pu s´épanouir dans une liberté identitaire enfin retrouvée. Tout cela, tant il est vrai que l´Algérie indépendante est un immense chantier de reconstruction et surtout de construction qui requiert tous les cerveaux et tous les bras des Algériens. Évidemment, comme toute oeuvre grandiose, c´est une oeuvre de grande haleine.
Voilà pourquoi, il est agréable de lire l´ouvrage de Foudil Benabadji que, par ailleurs, justifie une riche et pertinente préface de Mohammed Dib. Je me laisse influencer doucement par ce que notre grand écrivain a écrit à ce sujet. Natif de Tlemcen, Dib sait donc de quoi il parle: «L´auteur ne nous raconte pas que son vécu en Algérie, mais aussi en France. [...] De la guerre d´Algérie, il nous parle sans idée préconçue, passant des Almoravides aux Almohades, des Beni-Zianes aux Mérénides, des Juifs aux Pieds-Noirs, des grands hommes de l´histoire à ceux du présent. Que voilà une entreprise périlleuse, mais qui est tentée ici! Le lecteur s´embarquera pour une odyssée insolite, jalonnée de découvertes et d´émotions fortes.»
Le rêve de l´adulte puise le bonheur de se retrouver dans ses souvenirs d´enfance: kân yâ makâne fî qadîm ez-zamân… Il redevient lui-même, tout reconstruit de toutes les beautés de l´authentique culture apprises grâce aux contes de Grand-mère: Ma Khiti, elle-même personnage de légende. «Elle avait beaucoup appris au dur combat de la vie et voulait nous résumer les nombreux siècles de sagesse et de culture…[...] Mêlant le véridique au surnaturel, elle recrée indifféremment mythologie et histoire, fait cohabiter quelquefois des personnages ayant vécu à des époques séparées par des siècles.» Foudil Benabadji a, sans aucun doute hérité beaucoup d´elle: relater avec assurance et art, finalement éduquer et instruire! L´ensemble s´articule autour des thèmes suivants: le noyau familial, l´enfance dans le haouz de la cité, les us et coutumes, l´épopée andalouse, la colonisation, la géographie de l´ouest oranais, l´immigration.
L´ouvrage est agrémenté de 48 pages de cartes et photos de l´époque évoquée par l´auteur. On y trouve aussi des annexes utiles: un lexique arabe-français, des notes substantielles, une chronologie historique, une bibliographie, une histoire succincte de Tlemcen.
11 août 2011
1.Contes