Culture : ITINÉRAIRE D’UNE MILITANTE ALGÉRIENNE DE LUCETTE LARRIBÈRE HADJ ALI
Témoignage de guerre
Elle est la fille du Jean-Marie Larribère, un pionnier de l’accouchement sans douleur qui avait sa propre clinique à Oran. Après un premier mariage avec Robert Manaranche, Lucette, militante de la cause algérienne, aujourd’hui âgée de 91 ans, épouse Bachir Hadj Ali en 1963.
A travers cet ouvrage, elle livre un témoignage sur son engagement social et politique durant la période située entre 1945 et 1962. Lucette Hadj Ali est l’une des rares combattantes algériennes à avoir eu la chance de n’être jamais tombée dans les filets des soldats français comme le souligne Abdelkader Guerroudj, ancien condamné à mort de la guerre d’Algérie, dans la préface de ce livre. «Lucette a fait partie comme moi, et aussi comme son oncle le docteur Camille Larribère, du premier noyau des «combattants de la libération» (CDL) créé par le Parti communiste algérien (PCA) au milieu de l’année 1955…En effet, je sais qu’il existe quelques personnes… qui ont eu cette chance, durant les sept années de souffrances de notre peuple, de ne pas être inquiétées alors qu’elles ont participé à des actions lourdes qui auraient pu les amener à la torture, à la prison, peut-être même à la mort ou à la disparition par exécution sommaire» (p.9). Née à Oran en 1920, Lucette s’installe à Alger en 1942. Dès 1943, elle travaille comme journaliste à l’hebdomadaire du Parti communiste algérien, Liberté. Liberté effectua, entre autres, des reportages poignants sur la terrible famine qui sévissait dans le pays, en particulier dans le Constantinois, en soulignant la situation épouvantable des paysans qui subissaient en outre une répression forcenée. En s’élevant régulièrement contre l’exploitation, la misère généralisée que vivaient les Algériens, le journal se plaçait résolument en dénonciateur du système colonial lui-même», écrit-elle, pages 36 et 37. En 1945, elle rejoint l’équipe rédactionnelle de Femme d’Algérie, le mensuel de l’UFA ( Union des femmes d’Algérie). L’auteur retrace également son parcours au sein du journal Alger Républicain en 1952. «Les locaux du journal étaient situés boulevard La Ferrière (aujourd’hui, le boulevard Khemisti), à l’emplacement de ceux de la Dépêche Quotidienne… Aux côtés d’Henri Alleg, directeur du journal, et de Jacques Salort, son administrateur, la rédaction était dirigée par Boualem Khalfa et Issac Nahori… auxquels se joignit plus tard Hamid Benzine.» Allant de planque en planque, cette militante communiste entre dans la clandestinité. Elle habitera tout à tour à Saint- Eugène, Télemly et El-Biar. «Un matin, en me levant, j’allai à la fenêtre et constatai (horreur !) qu’une multitude de paras aux bérets verts emplissaient la cour au-dessous. J’allai aussitôt réveiller Bachir qui s’attela immédiatement à déchirer quelques textes dans les toilettes pendant que moi j’empilai quelques vêtements dans un cabas. On frappe alors à la porte… Pierre Mathieu nous expliquera par la suite que les paras avaient été chargés de recenser tous les résidents dans cet amas de bungalows où nous logions». p. 100. Et puis cette magnifique image de l’Algérie enfin libre que Lucette Hadj Ali tient à partager avec nous : «Les événements se précipitaient, quelques jours avant le 5 juillet, du haut de notre 4e étage, c’est avec une vive émotion que nous avons vu les premiers maquisards de la Wilaya IV qui descendaient calmement le boulevard sur le trottoir d’en face et entraient dans Alger : maigres et épuisés dans leurs uniformes délavés et usés, témoins de leurs derniers combats. En me penchant davantage sur le balcon, j’aperçus, spectacle réjouissant, le policier français qui réglait la circulation au carrefour en bas du boulevard (Bougara) descendre de son podium et de s’enfuir à toutes jambes». p. 110.
Sabrinal
Itinéraire d’une militante algérienne de Lucette Larribère Hadj Ali, édition du Tell, 2011, 550 DA.
Source de cet article :
http://www.lesoirdalgerie.com/articles/2011/08/11/article.php?sid=121366&cid=16
11 août 2011
Colonisation