Suspense
La mystérieuse affaire de Styles (71e partie)
Résumé de la 70e partie : Poirot va récupérer les résultats des analyses du cacao prélevé au fond de la casserole…
L’enterrement de Mrs Inglethorp eut lieu le lendemain, et le lundi, lorsque je descendis assez tard pour déjeuner, John m’attira de côté et m’affirma que Mr Inglethorp partait le matin même et allait s’installer aux «Armes Stylites» jusqu’à nouvel ordre.
— Je suis vraiment bien soulagé de penser qu’il s’en va, Hastings, dit mon honnête ami. C’était assez pénible auparavant quand nous le soupçonnions d’être coupable, mais c’est encore plus désagréable maintenant que nous nous reprochons tous notre injustice à son égard. Car c’est un fait : nous l’avons traité abominablement. Bien entendu, tout semblait contre lui… Je ne vois pas comment on pourrait nous blâmer ! Cependant, nous nous sommes trompés, et nous avons la sensation désagréable qu’il nous faudrait lui faire des excuses, ce qui est bien difficile, alors que l’individu nous déplaît tout autant qu’auparavant. La situation est fort embarrassante. Heureusement que mère n’a pas pu lui laisser Styles. L’idée qu’il trônerait un jour ici m’était insupportable. Mais il peut bien empocher l’argent.
— Pouvez-vous, cependant, entretenir la propriété ? dis-je ?
— Oh ! oui. II y a, bien entendu, le fisc à payer, mais la moitié de l’argent de mon père va avec la propriété. Et Laurence restera avec nous pour le moment, de sorte que sa part vient s’ajouter à la nôtre. Nous serons un peu à court d’argent au début, comme je vous l’ai dit, je suis assez gêné financièrement. Mais maintenant les créanciers consentiront à attendre.
Dans le soulagement général causé par le prochain départ d’Inglethorp, nous fîmes le déjeuner le plus calme que nous eûmes connu depuis la tragédie. Cynthia, qui avait le ressort de la jeunesse, était de nouveau tout à fait elle-même et plus jolie que jamais. Et, sauf Laurence, qui paraissait toujours aussi taciturne et nerveux, nous étions sereins comme à l’ouverture d’un avenir plein d’espoir.
Les journaux, bien entendu, exploitaient la tragédie. Des manchettes énormes, des biographies de tous les membres de la famille, des insinuations subtiles et l’annonce habituelle de l’indice possédé par la police : rien ne nous fut épargné. Les opérations du front marquaient une accalmie, et les journaux s’emparèrent avec avidité de ce crime mondain. «La mystérieuse affaire de Styles» fut le sujet de toutes les conversations du moment.
Tout cela fut, naturellement, fort désagréable aux Cavendish, leur maison fut continuellement assiégée par les reporters, auxquels on refusa la permission d’entrer, mais, qui continuèrent à hanter le village et le parc, fusillant de leurs Kodak tout membre de la famille qui s’aventurait dehors. Nous vivions dans un tourbillon de publicité. Les émissaires de Scotland Yard allaient et venaient, observant, interrogeant, avec des yeux de lynx et une langue bridée. Nous ne savions les buts ni les résultats de leurs recherches. Possédaient-ils vraiment quelque indice, ou bien l’affaire serait-elle classée dans un prochain avenir ? (A suivre…)
D’après Agatha Christie
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11 août 2011
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