Le Carrefour D’algérie
Mardi 9 Août 2011
Sra…ma…sra
Par Sayah
Si fier d’être ….pauvre !!!
Il patine, il patine, le pauvre! Parfois, il trottine. Avec ses maigres sous, il n’arrive pas à se remplir la panse, ni même à manger plus que le nécessaire requis. Il regarde ses enfants brouter avec l’espoir que demain serait meilleur. Il aurait aimé leur faire plaisir et leur ramener ce dont ils avaient envie, mais son salaire ne pouvait lui permettre un tel extra, une telle lubie.
Chaque matin, il prenait son couffin et se demandait s’il allait pouvoir en remplir la moitié et permettre à sa moitié de se débrouiller un repas décent. Chaque matin, il regrettait son départ à la retraite forcée et le maigre pécule qu’il recevait le 25 de chaque mois. Avec ses cinq enfants, sans revenus pour les deux plus âgés et budgétivores pour les scolarisés, il n’arrivait pas à joindre la moitié d’un mois stressant qui lui paraissait, à chaque fois, encore plus long, encore plus interminable. Chaque matin, Daho regardait ces nantis qui se payaient viande et fruits avec une facilité, qui lui paraissait indécente pour le pauvre qu’il paraissait. D’ailleurs, il ne se souvient plus du moment où, il avait franchi la porte d’un boucher, ou d’un poissonnier. Même la sardine qu’il adorait lui était maintenant impossible à aborder. Avec son éternel couffin rapiécé, il avait le sentiment d’avoir raté sa vie et de mettre en péril celle de sa famille. Il savait pertinemment que la misère était source de malheurs et que ses enfants, tôt ou tard, allaient être entraînés vers l’irréparable. D’ailleurs, il n’arrêtait pas, chaque soir, de leur réciter des versets de Coran à travers lesquels il louait les vertus de la droiture et de l’honnêteté. Daho ne cessait point de démontrer, à ses enfants, sa fierté personnelle à ne pas faire la chaîne, chez les associations d’aide aux nécessiteux, avec tous ces milliers de malheureux à qui on remplissait, chaque jour, le couffin du ramadan. En ces moments, il dégageait une fierté inouïe d’un pauvre malheureux qui se suffisait à lui-même, même si cette suffisance était en deçà de ses vrais besoins. Pour Daho et sa famille, manger n’était pas une fin en soi. Ce qui représentait le ciment et le fondement de leur vie s’articulait sur la sensation forte d’être fiers de ce qu’ils sont: fiers d’être pauvres!!!
medhayas@yahoo.fr
9 août 2011
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