Le Carrefour D’algérie
Mardi 9 Août 2011
Soug ennsa
Par Farida T.
Les mensonges blancs
Où s’arrête la politesse et où commence le mensonge? Où s’arrête la convenance et où commence l’hypocrisie? Pas toujours évident tant il est vrai que certaines situations imposent de «sauver les apparences» et par conséquent de «mentir»,
mais un petit mensonge «blanc». Le mensonge sans conséquence. Pas de ceux qui évoquent une trahison, ni de ceux qu’on formule pernicieusement à dessein de faire du mal à autrui. Tout simplement de ceux qu’on produit quotidiennement, machinalement, inconsciemment presque. D’ailleurs, une réflexion honnête et sincère en soi et avec soi-même, sans ces petits mensonges, aucune vie sociale ne serait possible. Aucune relation amicale ou amoureuse, non plus. A dire vrai, il faut admettre que ces petits mensonges sont nécessaires à toute cohabitation que l’on souhaite durable. Selon Dostoïevski, le mensonge serait même synonyme de la vie. Peut-on imaginer une relation amicale fondée sur des vérités blessantes et gratuites, surtout? Les femmes plus diplomates que les hommes, qui, d’ailleurs sont traitées d’hypocrites, l’ont compris et adopté depuis longtemps, le bon mensonge. Peut-on concevoir d’avouer à une amie qu’elle vous dérange, vous embête, qu’elle tombe comme un cheveu dans la soupe, que vous rêvez d’une sieste, que vous ne supportez pas ses enfants, que vous les trouvez d’une impolitesse outrageuse, d’une bêtise lamentable et d’une rare laideur et qu’aujourd’hui précisément, vous voulez rester seule. Peut-on imaginer dire à son hôtesse que sa soupe est insipide, son salon d’un fort mauvais goût, son gâteau pas assez cuit, sa coiffure ratée et que ses blagues ne font rire qu’elle et son débile de mari? Non, jamais. Ce ne serait pas convenable. D’ailleurs, les femmes ont assimilé depuis longtemps le code de bienséance, le protocole, adopté à l’unanimité, et jamais abrogé. C’est pourquoi, quitte à avoir les yeux toujours cernés par manque de sieste, des notes de téléphone faramineuses, des maux d’estomac pour avoir avalé des gâteaux infects, des céphalées pour avoir gardé les rejetons de la voisine durant la journée, des regrets toute sa vie d’avoir décroché le téléphone, elles continueront de feindre le plus grand des sourires mêmes édentés et le plus grand intérêt aux plus banales des discussions de paliers qu’elles transformeront grâce à des interjections émises à intervalles réguliers, en des confessions solennelles, quasi religieuses. Depuis l’aube des temps et partout dans le monde, cette notion de règle de conduite en bonne société existe. Au japon, à titre indicatif, l’omoté et ura sont les deux faces du comportement en société. L’une (omoté) convenable, l’autre (ura) cachée. Evidemment, certains amateurs pratiquants de «franchise» à sens unique, s’autoproclament «sincères» et «honnêtes» invétérés des vexations, désavouent ce type d’attitude. Que faire alors? Doit-on toujours tout se dire quitte à se blesser, se vexer les unes les autres, volontairement, délibérément et gratuitement. Toute vérité est-elle forcément bonne à dire? Tout n’est-il pas une question d’intention d’abord? Le mensonge, à juste dose et désintéressé, n’est-il pas réellement un élément indispensable à notre écosystème? Tout le monde aime la Vérité. C’est vrai. L’humanité en a besoin. Mais, elle a un besoin plus grand encore de flatteries, d’euphémismes et de litotes pour dessiner toutes ses espérances et continuer de rêver. Sans quoi, nous péririons tous d’ennui, de désespoir, de déception et, véritablem
9 août 2011
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