Festival de théâtre Off d’Avignon
Mahmoud Darwich, une poésie universelle
le 07.08.11 | 01h00
Scène du workshop Darwish Silence pour Ghaza.
Depuis la disparition de Mahmoud Darwich, sa parole, pétrie d’humanité, porte bien au-delà de la Palestine. Elle résonne dans tous les cœurs vibrant de liberté. De scène en scène, le verbe du poète prend son envol vers l’universel.
Avignon (France)
De notre envoyé spécial
En Avignon, il nous a été offert le vrai cadeau de voir Quand m’embrasseras-tu ? Un beau spectacle constitué à partir des textes du défunt poète palestinien Mahmoud Darwich. «Sa poésie est une arme, un cri d’amour qui devrait nous réveiller, nous, la communauté humaine, et nous faire sortir de notre léthargie pour évoquer toute la beauté qui nous entoure», justifie la compagnie Brozzoni qui l’a créé : «Choisir Darwich, c’est choisir la poésie, parce que c’est une force qui tient à son mystère.» Le metteur en scène, Claude Brozzoni, a découvert Darwich de façon fortuite.
Une amie lui avait remis un de ses recueils. «Quand j’ai lu le premier poème, je me suis dit ‘‘je ne comprends pas’’. Puis, j’ai fait confiance à son intuition, je suis parti avec sur la route du pèlerinage de Compostelle, 2000 kilomètres à pied. Mahmoud est progressivement rentré en moi. Au retour, en Bretagne, j’ai écrit le spectacle. Le texte est universel et parle à tout le monde, on peut le ramener à chacun d’entre nous. On a travaillé sur l’énergie, sur l’amour que les textes portent.»
Brise dans le désert
Pour lui, il est certain que Darwich est déjà entré dans la postérité. Il est dans le panthéon universel des poètes. «Quand on l’a classé comme le poète qui parle de la Palestine, bien sûr qu’il ne l’a pas renié, mais en même temps, il savait qu’il était plus que cela. On souhaite, incha’Allah, que le problème de la Palestine se résolve dans un partage équitable et, le jour où cela sera réalisé, le poète ne disparaîtra pas car il a la dimension des grands poètes du monde. Nous ici, on le découvre peu à peu. Notre volonté c’est de le faire connaître encore plus. On retrouve la joie, la puissance de l’auteur, c’est une brise dans le désert, un bouquet de fleurs, une tempête, une eau qui rafraîchit, une source. Cela s’est génial. Il porte la parole du monde.»
Sur scène, ils sont trois à le faire vivre : deux musiciens, Georges Baux et Claude Gomez, et un conteur diseur, chanteur, vibrant de sincérité, de passion et d’énergie, Abdelwaheb Sefsaf, d’origine algérienne, accompagné d’un dessinateur qui rythme de son art en arrière-plan du plateau les chansons et poésies de Darwich. Ils donnent voix et corps à la parole d’un poète qui a continué, malgré le désespoir vécu, «de chanter la terre, sa beauté et par-dessus tout à évoquer l’amour. Parce que cette voix est belle, qu’elle ne se complaît ni dans le cynisme, ni dans la morosité, ni dans la détresse, parce qu’elle est lyrique et humaniste, elle dit surtout l’espoir de tous et de chacun», explique Claude Brozzoni.
Les concepteurs citent Mahmoud Darwich : «Sans doute, avons-nous besoin aujourd’hui de la poésie, plus que jamais. Afin de recouvrer notre sensibilité et notre conscience de notre humanité menacée et de notre capacité à poursuivre l’un des plus beaux rêves de l’humanité, celui de la liberté, celui de la prise du réel à bras-le-corps, de l’ouverture au monde partagé et de la quête de l’essence.»
Jouer dans des endroits improbables
La compagnie Brozzini a déjà des contacts pour jouer dans plein d’endroits, comme les plus improbables : «On va le jouer en prison, à côté de Chambéry, dans les maisons de retraite. Le spectacle est un acte poétique, un moment de partage, comme avec les personnes âgées, les gens en parcours d’alphabétisation, les quartiers difficiles, vers les populations magrébines, et après on se retrouve autour d’un couscous, c’est un auteur d’amour, de passion, de partage, et la culture arabe est une belle culture qu’on doit connaître et vivre ensemble.Ce montage poétique, où la sincérité est offerte en partage, gagnerait à être vu par le plus grand nombre.
Walid Mebarek
© El Watan
8 août 2011
1.POESIE