XV. Holà! Quelqu’un, m’écriai-je; allons, qu’on m’ouvre, je veux partir avant qu’il soit jour. Le portier, qui était couché à terre, en travers de l’entrée, se réveille à moitié. Eh! vous ne savez donc pas, dit-il, que les routes sont infestées de brigands, vous qui parlez de partir à cette heure de nuit? Si quelque crime vous pèse sur la conscience, si vous avez assez de votre vie, nous n’en avons pas, nous,
de rechange à mettre en péril pour l’amour de vous. Mais, lui dis-je, dans un instant le jour va paraître. Et d’ailleurs je suis si pauvre! qu’est-ce que des voleurs pourraient me prendre? Ne sais-tu pas, imbécile, que dix contre un, fussent-ils autant d’athlètes, ne peuvent dépouiller un homme tout nu? Le portier n’avait fait que se tourner de l’autre côté, et déjà s’était à moitié rendormi. Bon! dit-il; et sais-je moi si vous n’avez pas expédié votre camarade, celui que vous amenâtes hier coucher avec vous; et si vous ne cherchez pas à décamper de nuit pour plus de sûreté? À ces mots (j’en frissonne encore) je crus voir la terre se fendre, me montrant l’abîme du Tartare et la gueule de Cerbère déjà béante pour me saisir. Je vis bien alors que ce n’était pas par bonté d’âme que Méroé avait épargné mon cou; l’aimable créature me réservait pour la croix.
8 août 2011
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