Suspense
La mystérieuse affaire de Styles (65e partie)
Résumé de la 64e partie : Pour Poirot, outre Laurence Cavendish, bien d’autres personnes sont suspectes…
Poirot me jeta un regard bizarre que je ne pus déchiffrer. Il parut sur le point de parler, mais se ravisa.
— Miss Murdoch aussi, ajoutai-je. II n’y a rien d’équivoque en elle.
— Non. Mais il est fort étrange qu’elle n’ait pas entendu le moindre bruit, bien qu’elle couchât à côté de Mrs Inglethorp… Tandis que Mrs Cavendish, dont la chambre se trouvait dans l’aile opposée de la maison, a distinctement entendu tomber la table.
— Eh bien, elle est jeune. Elle a un sommeil de plomb !
— Ah ! en effet ! Elle doit avoir un fameux sommeil, celle-là !
Le ton de sa voix me déplut quelque peu, mais à ce moment nous entendîmes heurter à la porte et, en regardant par la fenêtre, nous vîmes les deux détectives qui nous attendaient dans la rue.
Poirot saisit son chapeau, fit un croc féroce à sa moustache, et brossant avec soin un grain de poussière imaginaire de sa manche, il me fit signe de descendre le premier. En bas, nous rejoignîmes les détectives et prîmes sans tarder la direction de Styles.
Je crois que l’apparition des deux émissaires de Scotland Yard causa une émotion – surtout à John – bien qu’il eût pu deviner, d’après le verdict, que leur arrivée dût être imminente. Pourtant la présence des détectives lui rendit plus sensible la gravité de la situation.
Pendant le trajet, Poirot s’était entretenu à voix basse avec Japp, et ce fut ce dernier qui demanda à tous les habitants de Styles, à l’exception des domestiques, de se réunir dans le salon. Je compris la signification de cette demande. Poireau devait prouver ses dires.
Personnellement, je n’avais pas grand espoir. Poirot pouvait avoir d’excellentes raisons de croire à l’innocence d’Inglethorp, mais un homme comme Summer-haye devait exiger des preuves tangibles, et je doutais que Poirot pût les lui fournir.
Bientôt nous fûmes tous réunis dans le salon, dont Japp referma la porte. Poirot avança poliment des chaises pour tout le monde. Tous les regards étaient fixés sur les détectives de Scotland Yard, et je crois que nous comprîmes alors pour la première fois qu’il ne s’agissait point d’un mauvais rêve, mais d’une réalité. Nous avions bien lu que pareilles choses arrivaient parfois, mais maintenant nous étions nous-mêmes les acteurs du drame. Demain, les journaux proclameraient les nouvelles en en-têtes énormes :
TRAGEDIE MYSTERIEUSE EN ESSEX
RICHE PROPRIETAIRE EMPOISONNE
Il y aurait des photographies de Styles, des instantanés de «la famille quittant l’enquête», car le photographe du village n’avait pas perdu son temps. Nous vivons ici un de ces récits, lus bien souvent, d’aventures arrivées à d’autres, mais impensables pour soi-même. Un assassinat a bien été commis dans cette maison. Devant nous se tiennent les détectives chargés de l’affaire.
J’eus l’impression que tout le monde fut surpris que ce soit Poirot qui prenne l’initiative de l’interrogatoire et non les détectives officiels. (A suivre…)
D’après Agatha Christie
http://www.infosoir.com/edit.php?id=130318
3 août 2011 à 16 04 08 08088
Bizzz des cafards en vadrouille