Edition du Mardi 12 Janvier 2010
Chronique
À trop manipuler l’arme du football (II)
Par : Mustapha Hammouche
La déception est à la mesure du gavage d’espérance à laquelle le football devait seul répondre. Il n’était plus possible de parler d’autre chose.
De ce qu’il est encore possible d’intercepter un groupe de dix terroristes du côté de M’sila, de ce que les “fonctionnaires” de la SNVI exigent du… gouvernement, de ce que les vrais fonctionnaires, ceux de l’enseignement et de la santé endurent de mépris, de ce qu’on peut brûler de lieux de culte non musulman sans qu’on s’en émeuve outre mesure, de ce qu’une éminente rectrice d’université ou un non moins éminent médecin spécialiste préfèrent être promus à la planque de sénateurs, parce qu’on y assure mieux sa sécurité sociale…
Non, il n’y avait que le match, toujours déterminant, qui opposait l’Algérie au Malawi, un match sans enjeu, tant il représentait la partie fixe du fixe du résultat de l’équipe nationale en ce premier tour de la CAN.
Comme Cendrillon n’est pas africaine, il n’y avait pas à craindre de cette “petite” nation footballistique. On pouvait donc, sans risque de se ridiculiser, parodier le “score de handball” qui, la veille, clôturait le match d’ouverture entre l’Angola et la Mali. Et le voyage du président de la Fédération avait couronné ce stage d’hiver en prévision d’un tournoi en plein été africain par une “discussion empreinte de maturité et de responsabilité”, c’est-à-dire une négociation où chacun a étalé le prix de sa contribution au triomphe annoncé.
Il s’est trouvé même un dirigeant de la Fédération pour s’offusquer de ce que “la presse continue à nous critiquer et à diffuser de fausses informations”, autrement dit à se mêler de ce qui ne la regarde pas et ne regarde pas le public : l’argent. Suite à quoi, il inflige à cette presse, pour une fois trop critique et trop curieuse, la punition de lui “tourner le dos”. Les joueurs ne sont pas seuls à avoir flairé la belle affaire. Hier, tôt le matin, les étals étaient posés : des drapeaux de toutes formes en prévision de la demande pour le défilé du soir. Il y a toujours, partout, et à tous les niveaux, des gens qui savent transformer une cause en argent. Des “succès” musicaux, des affiches, des calendriers ont fleuri depuis le 18 novembre. Vous voulez des résultats politiques, on fait semblant de participer à l’élan national et on se sucre en passant !
Jeudi dernier, après la séance de négociation des primes, nous écrivions que, “finalement, seuls les supporters, les fantassins des allégresses que le football justifie une fois tous les vingt-cinq ans, croient qu’une compétition internationale est une aventure communautaire”. Nous avons surtout fait remarquer que les principaux acteurs y voient peut-être – surtout – que “la finalité politique justifie toutes les prodigalités”.
Au point où l’on ne voyait plus que cela.
La défaite aurait été moins tragique pour les “fantassins” de l’aventure si l’on n’avait pas hissé les réalisations de cette équipe au rang de projet national. Et si l’on n’avait voulu faire de cet “assemblage de professionnels de championnats étrangers” la vitrine trop bichonnée d’une arrière-boutique trop vide.
M. H.
musthammouche@yahoo.fr
http://www.liberte-algerie.com/edit.php?id=128501
2 août 2011
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