C’est bientôt sidna ramadane. Et des ramadans, il en a passés, des frais et des très chauds. Des frais, il y en a eu à tous les coups quelle que soit la saison. Des saisons, il en a vu passer. Du passé, c’est tout ce qui lui reste pour parler de ce présent qui ne lui a fait aucun présent. «Présent, oui monsieur, c’est moi le retraité», répond-il au guichetier qui l’appelle.
- C’est à quel sujet, yal hadj ?
Déjà il n’aimait pas qu’on l’affuble de ce titre de hadj, qui dépend d’un tirage au sort, d’où sortent les heureux élus d’une omra offerte par la société qui a plus employé de syndicalistes que d’employés, mais bon. Le guichetier, ce pauvre bougre préposé au sale boulot, n’a rien à voir dans tout cela, se dit-il sage, retraité qu’il est.
- C’est au sujet du verbe, mon fils. Le verbe virer. Est-ce que la pension des virés a été virée y oueldi.
- Manich oueldek, yal hadj, bouya ne fera jamais la chaîne. Et votre pension n’a pas encore été virée.
Penaud, il s’en retourne chez lui, chez les bouches dégoûtées qui attendent la pension.
Le lendemain, pareil, même chaîne, sans chène il se fond dans cette foule qui se déchaîne, dès l’ouverture de la poste. Là, il est certain que la pension est là. Bla chaik, il remet son chèque. Un tour, deux tours, quelques vautours et puis s’en vont, des entourloupettes et puis vint son tour.
- Goulnalkoum, il n’y a pas d’espèces
Aucune espèce dans ce bled n’encaisse en espèces. La seule espèce qui a le droit d’utiliser un chèque sans avoir en contrepartie de l’espèce, c’est l’espèce retraitée. Il pensait qu’il était le seul à être dans cette situation, oh que non, tous les retraités sont dans son cas. Tous ceux qui ont fait le bonheur de leur boîte pendant des ans sont considérés comme des retraités des boîtes
de nuit comme de jour, jusqu’à la fin de leur vie. Eddènia bent el mekki tantôt elle fait rire, tantôt, t’bekki.
30 juillet 2011
Contributions