De nouveau, l’Algérie gagne contre l’Egypte. Il s’agit cette fois-ci de la finale de coupe du monde militaire, jouée au Brésil, pays du foot, nation qui a été éliminée en demi-finale par l’Algérie. L’arrivée en bonne place en haut de la hiérarchie de la discipline de ces deux formations arabes nous impose une halte, une réflexion, et pourquoi pas une analyse objective et sereine de leurs parcours respectifs et image de ce football que véhicule désormais le continent africain.
Et si l’équipe militaire de l’Egypte ne fait que confirmer cette suprématie du pays des pharaons sur tout le continent africain malgré le net déclin de ces tout derniers mois et confrontations internationales, la formation algérienne ne peut qu’étonner son monde cantonné dans ces anciens schémas stéréotypés, importés le plus souvent de l’Occident avec comme vivier la jeune population de notre brave émigration. Avant la finale de cette coupe du monde militaire brillamment remportée par la formation algérienne, c’est en ces termes précis que se situaient les deux niveaux footballistiques des deux pays considérés : une Egypte qui produit des étalons et du beau spectacle et football, prenant de la dimension internationale et énormément d’avance sur tout le continent, et une Algérie qui importe (comme toujours et pour tous ses besoins) ses « talents » de l’étranger pour constituer son équipe-fanion.
Toute proportion gardée, l’Egypte ne recèle pas tous ces gisements de ressources et d’énergie dont celle humaine, tout le temps marginalisée ou mise en hibernation, dont dispose l’Algérie. Et pourtant son football se situe très loin devant celui algérien dans la hiérarchie mondiale de cette discipline considérée.
Pourquoi ?
Abderrahmane Mehdaoui et l’équipe nationale militaire viennent à leur tour d’y répondre de fort belle manière. Le résultat est bien là, consécration à l’appui !
Arrêtons donc à ce niveau-là la comparaison entre les deux pays pour faire ou refaire le diagnostic de notre football.
Avant l’arrivée de Rachid Mekhloufi comme entraîneur de l’équipe nationale au milieu des années soixante-dix du siècle dernier, l’Algérie n’avait jamais gagné le moindre titre continental ou régional. Depuis, ce fut des titres en série gagnés en équipe nationale par Rachid Mekhloufi (2) à côté d’Abdelhamid Kermali, et en club par Hamid Zouba (MCA), Khalef (JSK), Laaribi (ESS) et autres encore
Lors de toutes ces confrontations internationales bien menées avec au bout de l’effort cette consécration méritée, il y eut deux éléments-clés que l’on aura au passage durant toute cette longue période négligés. Peut-être même astucieusement abandonnés, délaissés ou sous-estimés
Il s’agit en fait :
- de la valeur intrinsèque du produit local;
- et du coaching-maison.
Personne ne peut nier à présent que c’est à l’intérieur même de l’une des casernes du pays qu’est née ou sortie de l’ornière cette merveilleuse équipe des jeux Méditerranéens de 1975 qui devait nous combler de ce football de charme jusqu’à nous faire oublier tout un pan de l’équipe d’avant bien menée par les Lalmas, Salhi, Khalem, Seridi et compagnie dont Rachid Mekhloufi mit prématurément fin à leur carrière internationale pour leur substituer cette toute nouvelle génération de footballeurs bien née sous la houlette d’un Draoui Aïssa comme chef d’orchestre et d’un Betrouni bien décisif dans ses échappées et buts de dernière minute.
C’est donc avec Rachid Mekhloufi qu’il y eut cette rupture bien féconde où les vrais artistes étaient ces jeunes talents formés à la maison. Et c’est donc, trente-six ans plus tard, que l’histoire se répète avec un autre Algérien à la tète de l’équipe nationale (militaire à part entière cette fois-ci) et d’autres talents du cru. Il s’agit de l’entraîneur Abderrahmane Mehdaoui.
Autant Rachid Mekhloufi que Abderrahmane Mehdaoui, à l’instar de leurs nombreux pairs, sont à féliciter pour le travail de « pro » dont ils auront été les artisans avec des joueurs amateurs et du terroir au moment où l’équipe nationale algérienne court après ces entraîneurs étrangers et ces autres joueurs que forment les centres de formation du football européen.
Il faut tout de même retenir qu’aucun entraîneur étranger ayant exercé en Algérie n’aura pu nous procurer cette joie de gagner ces précieux titres continentaux, régionaux ou mondiaux, excepté l’apport de technicien qu’avait apporté Rogov au groupe d’encadrement formant le staff technique de l’équipe nationale de 1982, laquelle faut-il au passage souligner qu’elle est en partie l’œuvre à la fois des Mekhloufi, Mokdadi, Saâdane et compagnie depuis les JM de 1975 en passant par la Coupe du monde junior et les JM de l’ex-Yougoslavie. Et pourtant des entraîneurs étrangers de renom avaient exercé durant cette longue période au sein des clubs algériens et de l’équipe nationale du pays. Pour rappel, il y avait les Kader Firoud, Jean Snella, Makri, Rajkov, Rogov et toute une pléiade d’autres joueurs surtout français s’étant depuis convertis en entraîneurs de club derrière lesquels courent les dirigeants de certaines équipes du pays. Pour toute leçon à retenir, il y a ce nouveau trophée gagné de haute lutte et fort belle manière par un entraîneur algérien et des joueurs formés localement. C’est d’ailleurs de la même façon que l’Egypte avait remporté en série ses derniers titres continentaux. Et si en Egypte, c’est toute une génération dorée de grands talents qui quitte tout naturellement la scène sportive internationale, en Algérie de nouveaux noms du produit local imposent leur ascendant sur cette même scène sportive internationale. Avec Rachid Mekhloufi et Abderrahmane Mehdaoui, l’occasion leur a été donnée de prouver la plénitude de leur talent.
Et si Mekhloufi a donné les deux premiers titres internationaux à l’Algérie, Mehdaoui avait à une certaine époque formé et drivé cette équipe nationale algérienne de charme qui avait fait plier le grand Ghana de Abédi Pelé, il y a juste quelques saisons. Et comme l’artiste éprouve du plaisir à rééditer ses exploits, Mehdaoui a encore une fois brillamment refait son coup ! Un coup de maître cette fois-ci !
Convenons tout de même que notre pays est un immense réservoir de grands talents sportifs, et qu’à côté de cela il y a également cette nécessaire compétence locale qui a souvent réussi à bien les mener vers ces succès internationaux.
Au plan footballistique, l’Egypte n’est plus ce « mythe algérien » tout comme d’ailleurs le Ghana, le Cameroun ou le Nigéria. N’est-ce pas cette équipe junior du Ghana qui a fait trembler ces grandes nations de la dernière Coupe du monde ?
Souhaitons tout de même que la composante de la jeune équipe nationale militaire fasse également le même chemin. Maintenant que le résultat dans ces basses catégories est là, il faut y croire tout simplement !
Le peuple algérien éprouve vraiment de la honte à voir son football géré de la même manière que l’est l’économie du pays où tout est malheureusement importé et où le produit local est tout naturellement dévalorisé, déclassé, sous-évalué, sous-estimé, déprécié, négligé, occulté au profit de celui parfois de moindre qualité ramené de l’étranger !
Un choix dans la stratégie de la gestion de notre football s’impose donc. En Egypte, cette question a été tranchée il plus d’une décennie avec ces résultats que tout le monde connaît à présent. Aurons-nous le courage de copier intelligemment et sans le moindre complexe le pays des pharaons ? Et si c’est le cas que ferons-nous de nos dirigeants actuels et surtout de notre invité-surprise Wahid Hallilodzic ? Encore une fois la réponse à nos questionnements du moment, ce sont les résultats techniques qui la donneront en temps voulu ! Entre-temps, le monde sportif doute fort qu’elle soit à la hauteur de celle obtenue par l’Egypte ! Peut-être même encore moins que celle réalisée par les Rachid Mekhloufi et Abderrahmane Mehdaoui ! En football, ni la triche ni le mensonge n’ont de place. Et parfois toutes les grandes carrières sportives de Henri et Maradona se résument à ces mains du diable, de Satan, de la ruse ou même de Dieu que ces artistes traînent derrière eux tels de vrais boulets. Et pourtant, en Algérie on a souvent confondu politique et sport pour continuer à toujours tricher ! A quand ce « réveil des justes » ?
(*) Écrivain, chroniqueur
28 juillet 2011
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