Cela s’est passe un jour/ Aventures, drames et passions celebres
Hommes et femmes au destin prodigieux (99e partie)
Par K. Noubi
Résumé de la 98e partie : C’est à treize ans que Manolete décide de faire carrière dans la tauromachie. Un de ses parents, Camora, propose de lui apprendre le métier.
Comme l’a averti son parent, il doit d’abord travailler comme novillero, c’est à dire novice : ce n’est pas lui qui combat le taureau ou le tue, mais il participe au combat. Un rôle qui n’est pas à la mesure de ses ambitions, mais qui est nécessaire pour qui veut se former à l’art de la tauromachie.
Comme partout, dans cette Andalousie des années vingt, la tauromachie est le sport et l’activité favorite des jeunes gens. C’est aussi un art codifié, avec ses règles et son code, depuis… deux siècles !
S’il est vrai que le combat avec le taureau, en Espagne, remonte loin dans le temps, la tauromachie, telle que nous la connaissons n’existe que depuis le XVIIIe siècle. C’est, d’après la tradition, dans la petite ville de Ronda, que Francesco Romero élabore les règles de la corrida. C’est lui qui va définir les trois moments du combat ou «tercios» : les piques, les banderilles ou action de planter la pique ornée des rubans dans le garrot de la bête, pour l’affaiblir, et enfin, la «muleta» ou mise à mort. Le propre neveu de Francesco, pedro Romero, qui a été le premier grand matador de l’histoire, a illustré les principes de son oncle… La tauromachie s’est affinée tout au long du XIXe siècle, jusqu’à devenir un art raffiné, exigeant, non plus la force mais la prestesse, l’intelligence et la beauté du geste du matador.
— C’est cela, qu’il faut acquérir, explique Camora Manolete : prestesse et élégance ! Ta force sera dans tes mouvements !
Depuis la fin du XIXe siècle même, on a fait de la lenteur du geste du toréador une règle : il fallait montrer que face à la furie bouillonnante de la bête, l’homme peut maîtriser ses émotions, coordonner ses gestes… La beauté de l’acte tauromachique se fonde sur deux grands pricipes, ainsi que l’explique Camora au jeune Manuel :
— Templar, apaiser la bête, de façon à agir sur son rythme de charge et cargar, charger, de façon à lui imprimer ton propre rythme et à la dominer ! Et c’est seulement une fois que le taureau est à ta merci que tu peux te placer dans l’axe de sa charge et lui porter l’estocade. Tu m’as compris ?
— Oui, dit Manuelo.
— je veux que tu sois sûr de toi, parce que tu risques ta vie.
Le jeune garçon acquiesce.
— je ferai attention !
Il apprend, admiratif. Il apprend si vite que Camora est tenté de le confronter à une bête, malgré son âge.
La mère du jeune garçon, elle, n’est pas tellement contente de ce que fait son fils. D’abord, c’est dangereux, parce qu’il peut toujours être écrasé par la bête, ensuite ce n’est pas rémunéré. Or, à la maison, on a de plus en plus besoin d’argent pour nourrir sept enfants… La veuve ne peut plus s’en sortir seule.
— Manuelo, il va falloir que tu travailles !
— Oui, dit-il.
Il travaillera mais il continuera à apprendre la tauromachie… (A suivre…)
18 juillet 2011
1.Extraits, K. Noubi