Peut-on associer WikiLeaks au printemps arabe sans se tromper outre mesure sur la capacité des peuples arabes à s’assumer librement, en dehors de toute influence extérieure ? Pour beaucoup, Julian Assange et ses informations relayées par des médias majors ont, quelque part, apposé leurs empreintes sur le cours de la toute récente
révolution bitumée. La divulgation de secrets sur la corruption des régimes arabes, leur vassalité à Washington et Israël et les poignards brandis dans le dos des peuples frères ont encouragé une jeunesse désabusée à défier des palais chancelants. Mais penser que WikiLeaks serait le déclencheur de ces marches vers la liberté, c’est réduire, encore une fois, les volontés des peuples arabes à un sentiment d’infériorité, incapables de se prendre par la main et s’émanciper des chancelleries étrangères. Pourtant, il faut se rendre à l’évidence que Bouazizi en s’immolant aurait pu rester une victime anonyme des systèmes totalitaires arabes si ce n’était l’ère d’Internet et des réseaux sociaux actionnés comme porteur de bombes.
Depuis, où est donc passé Julian Assange, le père fondateur de Wikileaks, la plus vaste campagne de désinformation de ce début du 21ème siècle ? La question a le mérite d’être posée puisqu’après un tsunami ininterrompu de câbles diplomatiques classés confidentiels, du jour au lendemain, WikiLeaks disparaissait de notre actualité quotidienne, laissant la place à d’autres événements mondiaux. Zappés par les cadors de l’information, les câbles ont pu trouver une petite place dans la rubrique des chiens écrasés dans quelques journaux régionaux de Pakistan, Irlande et Sidi Walou. WikiLeaks, pour les tenants de la thèse du grand complot judéo-chrétien contre le Croissant, a été instrumentalisé à des fins purement stratégiques afin de modifier la carte politique arabe et créer une diversion pour permettre à Israël de se préparer à une éventuelle frappe militaire contre Téhéran. Pour ce faire, un jeu de domino a été mis en place, avec pour finalité, isoler l’Iran et l’attaquer.
Le job de WikiLeaks accompli, on l’a remisé au placard, à côté de la grippe aviaire, porcine, du danger communiste. Parmi les vieilleries côtoyées, on retrouve également les vestiges de la 4ème armée au monde, le péril jaune, les petits hommes verts, le masque de Ben Laden, les moustaches d’Hitler et la relique de Raspoutine. Pour les férus d’enquêtes policières, la trace d’Assange, qu’on dit recherché par Interpol, a été retrouvée dans les tiroirs à double fond de Ksentini. D’autres affirment l’avoir vu se prélasser dans des palaces du Mossad du côté de Tanger alors que certains jurent qu’il se fait tout « petit », endossant l’identité d’un modeste enseignant de français dans un lycée à Relizane et qu’il habiterait un studio miteux à Bormadia.
18 juillet 2011
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