Une ville, une histoire
Si l’Algérie m’était contée (66e partie)
Par K. Noubi
Résumé de la 65e partie : Les commerçants sillonnent le désert, puisant l’eau du puits qu’ils ramènent dans les villes où ils la vendent au prix fort.
Dans les villes, ils se mettent à crier : «Qui veut de mon eau ? elle est limpide et fraîche ! elle a un goût exquis !»
On s’approche du marchand ;
— D’où vient cette eau, marchand ?
Si le marchand répond : «Mon eau vient de bir al-Omayr !», alors on s’approche, on achète une outre ou deux et si ce n’est pas le cas, on s’en éloigne, attendant que d’autres marchands viennent proposer de la vraie eau de bir al-Omayr.
Un jour, des commerçants quittent la ville, en direction du puits. Ils ont emporté avec eux plusieurs chameaux et des centaines d’outres qu’ils vont remplir du précieux liquide. Beaucoup ont déjà des commandes : tel citadin prendra deux outres, tel autre trois, tel autre encore cinq… Certains ont même payé à l’avance…
La caravane des commerçants avance péniblement dans le désert. Le soleil darde ses rayons, le sable est brûlant, mais les commerçants ont l’espoir de se reposer bientôt, près du puits d’al-Omayr. Ils boiront de son eau, rempliront leurs guerbas et rentreront chez eux.
— Le puits !
On aperçoit de loin les pierres qui l’annoncent et on redouble d’énergie. Dans quelques minutes, on s’assoira sur sa margelle et on savourera l’eau fraîche…
On approche du puits, on y arrive presque. C’est alors que quelqu’un crie : «Qu’est-ce que cette ombre ?»
Une ombre vient, en effet, de surgir du puits et elle se met à grandir ;
— Arrière ! crie quelqu’un, arrière !
Mais le désert est, dans cette contrée, aride : il n’y a ni rocher ni arbre derrière lesquels on pourrait se cacher…
— Qu’est-ce que cela peut être ?
— Sauve qui peut !
Cependant, dans la ville, les gens commencent par s’impatienter, notamment ceux qui ont payé l’eau à l’avance.
— Que font-ils ? se demande-t-on.
— Peut-être se sont-ils endormis sur la margelle du puits où, dit-on, il règne une fraîcheur permanente !
— A moins qu’ils ne soient allés vendre leur eau dans une autre contrée, où ils espèrent recevoir plus d’argent !
— Ce ne serait pas honnête de leur part !
— Ils sont loyaux, ils ne feraient pas cela.
On pense aussi aux voleurs qui sillonnent le désert ou aux mauvais esprits. Ne dit-on pas que le désert fourmille de djinn et djeniat, de génies mâles et femelles guettant les voyageurs… Beaucoup ont ainsi disparu dans le désert sans qu’on sache ce qu’ils sont devenus. (A suivre…)
8 juillet 2011
1.Extraits, K. Noubi