Suspense
Les pendules (25e partie)
Résumé de la 24e partie : Hardcastle et Colin font un tas de supputations quant à l’agent d’assurances retrouvé mort chez miss Pebmarsh…
Vas-y, moque-toi bien de moi. Ce n’est pas toi le pauvre bougre responsable de cette enquête aux yeux de ses supérieurs !
— Oh ! bon, bon. Espérons que tu pourras tirer quelque chose des voisins.
— J’en doute, fit Hardcastle avec aigreur. Même assassiné en plein milieu du jardin et transporté par deux hommes masqués dans la maison, personne n’en saurait rien, personne n’aurait regardé par la fenêtre. Par déveine, ce n’est pas la campagne ici. Wilbraham Crescent est habité bourgeoisement. A partir de 1 heure, les femmes de ménage, qui, elles, n’ont pas les yeux dans leurs poches, n’y sont plus. Pas une voiture – même d’enfant – ne roule par ici.
— Il n’y a pas de vieil infirme assis au long du jour devant sa fenêtre ?
— Ce serait l’idéal. Mais non, aucun.
— Et au 18 ? Au 10 ?
— Au 18, nous trouvons un Mr
Waterhouse et sa sœur ; lui est «principal» chez les avoués Gainsford et Swettenham ; elle s’occupe «principalement» de lui. Quant au 20, tout ce que j’en sais c’est qu’il y vit une femme qui élève au moins vingt chats. Moi, les chats…
Je compatis à la dureté de son existence, et sur ce, nous voilà partis.
Sur les marches du 18, Mr Waterhouse hésitant, lançait un regard inquiet à sa sœur :
— Tu es sûre qu’il ne t’arrivera rien ?
— Enfin, James, que veux-tu dire ? ronchonna miss Waterhouse exaspérée.
Mr Waterhouse prit cet air contrit qui chez lui devenait une seconde nature.
C’est seulement, chère amie, qu’étant donné ce qui s’est passé hier… à côté… je pensais qu’il…
Très soigné, cheveux grisonnants, Mr Waterhouse s’apprêtait à partir à son étude. C’était un homme grand, un peu voûté, au teint hâve et non clair, bien qu’il eût l’air en bonne santé.
Quant à miss Waterhouse, grande, anguleuse, elle était de ce genre de femme exigeante envers elle-même, intolérante envers les autres.
— Enfin, pourquoi diable veux-tu, qu’on m’assassine aujourd’hui parce qu’on a assassiné hier chez la voisine ?
— Mais, Edith, tout dépend du meurtrier auquel on a affaire…
— Alors, tu crois vraiment qu’il y a quelqu’un en train de déambuler dans Wilbraham Crescent pour choisir une victime dans chaque maison ? Je voudrais bien voir qui oserait entrer ici pour essayer de me tuer, moi, ajouta-t-elle avec humour.
A la réflexion, son frère s’avoua que c’était difficilement concevable. S’il avait dû se choisir une victime, loin de lui l’idée de prendre sa sœur. Car il est plus que probable que celle-ci, en cas d’attaque, aurait assommé son agresseur avec un tisonnier ou une barre de fer, pour le livrer tout ensanglanté et fort penaud entre les mains de la police.
— Je voudrais seulement t’avertir, dit-il toujours plus humble, que… euh… quelques individus malsains traînent dans les parages.
— Sait-on encore ce qu’il s’est passé vraiment ? commenta miss Waterhouse. Il circule tant d’histoires. Encore ce matin, Mrs Head m’en a raconté d’extraordinaires. (A suivre…)
D’après Agatha Christie
8 juillet 2011
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