Au coin de la cheminée
La cloche rêveuse (2e partie et fin)
Résumé de la 1re partie : L’oiseau, après avoir accompagné la cloche à destination, lui vole tout son «chargement» de friandises…
Sur ces mots, l’oiseau la quitte. Elle l’entend se moquer, ricaner, glousser. Elle gémit. L’heure est aux regrets, au repentir. Tant bien que mal, elle se redresse et rejoint son petit clocher banal. Par sa faute, les enfants du village seront privés de chocolat. Elle s’examine avec le plus grand soin. Plus le moindre copeau de chocolat, plus le moindre œuf, le moindre sujet. Elle pleure et ses pleurs parviennent jusqu’aux cieux.
«J’ai honte. Je suis furieuse. Comment oserai-je encore sonner ? J’en veux à ces nuages, ces paysages verdoyants et surtout à cet oiseau de malheur. Maudits soient-ils tous et maudit soit le chocolat !»
A peine a-t-elle parlé ainsi, que la voici transformée tout entière en chocolat. Le matin de Pâques, se répand par tout le village une délicieuse odeur. Pourtant, les jardins sont vierges des sujets qui les décorent habituellement, ce matin-là. Avant la messe, impossible au sacristain de faire tinter la cloche. Le pauvre homme est désappointé. Il va aller voir là-haut mais plus il s’approche, plus il est écœuré par l’odeur. Le sens du devoir étant le plus fort, il progresse en dépit des hauts-le-cœur. Enfin, il aperçoit la cloche fautive, immense, brillante, brune, décorée d’une sorte de pictogramme. Il court se confier à son curé.
«Il n’y a plus qu’à la casser, à la partager entre tous les habitants du village», estime le curé.
Sitôt dit, sitôt fait. Il faut même avoir recours au bûcheron pour avoir raison de la cloche. Le curé est bien désappointé de se trouver sans cloche mais les enfants sont ravis. Jamais il n’y a eu autant de chocolat un jour de Pâques. Jamais le chocolat n’a eu un arôme à la fois si doux et si puissant. Longtemps des effluves de chocolat restèrent présents dans tout le village. Les jours qui suivirent, on vint de tous les environs pour flairer et pour déguster. Quelques jours plus tard, tous les villageois s’unirent pour rassembler les fonds nécessaires à l’achat d’une nouvelle cloche. Il faut dire que la vente des surplus de chocolat aux étrangers alimenta pour beaucoup la collecte. Ainsi fut remplacée l’inconsciente. On ne s’expliqua pas ce qui était arrivé. On évita tout commentaire. Les années suivantes, la nouvelle cloche remplit son rôle à la perfection.
Micheline Boland
1 juillet 2011
1.Contes