Suspense
Les pendules (55e partie)
Résumé de la 54e partie : L’inspecteur téléphone à Colin qui lui apprend qu’il a déjeuné avec Sheila à 13h…
Du regard, Hardcastle parcourait ses notes : c’est entre midi et demi et 13 heures qu’on avait assassiné Edna Brent.
— Notre menu t’intéresse ? fit Colin acerbe.
— Te fatigue pas. Je voulais l’heure exacte, c’est tout, pour mon rapport.
— Ah ! bien. Si nous en sommes là…
Silence. Puis, conciliant, Hardcastle proposa :
— Si tu n’as rien de mieux à faire, ce soir…
— Je pars, l’interrompit Colin. J’étais en train de boucler ma valise. En rentrant ici, j’ai trouvé un message. Je dois filer à l’étranger.
— Et tu reviens quand ?
— D’ici une semaine – plus longtemps peut-être – ou jamais.
— Quelle tuile pour toi, est-ce que je me trompe ?
— Sait-on jamais, philosopha Colin en raccrochant.
Hardcastle arriva au 19 juste au moment où miss Pebmarsh allait sortir.
— Vous êtes au courant ? dit-il.
— De quoi donc ?
— Je pensais qu’on vous avait prévenue. On a assassiné une jeune fille dans la cabine téléphonique du coin de la rue.
— Assassinée ? Mais quand donc ?
— Il y a deux heures et demie environ.
— Personne ne m’en a soufflé mot. Personne, dit miss Pebmarsh d’une voix acrimonieuse, comme si elle prenait soudain cruellement conscience de son infirmité. Une jeune fille assassinée. Et qui ça ?
— Edna Brent, une employée de l’agence Cavendish.
— Encore quelqu’un de là-bas. Mais l’avait-on convoquée comme l’autre, cette Sheila Webb ?
— Pas à ma connaissance. Elle ne serait pas venue vous rendre visite par
hasard ?
— A moi ? Non, certes pas.
— Vous étiez chez vous à cette heure-là ?
— Peut-être. Quelle heure disiez-vous ?
— Vers les midi et demi.
— Oui, acquiesça miss Pebmarsh, oui, je devais être rentrée.
— Après l’instruction, où êtes-vous allée ?
— Droit à la maison. (Elle se tut, puis elle ajouta) Qu’est-ce qui vous fait penser que cette fille aurait pu désirer me voir ?
— N’était-elle pas au tribunal, ce matin ? Elle vous y a aperçue. Pour qu’elle vienne à Wilbraham Crescent, il devait y avoir une raison.
— Mais pourquoi chez moi, seulement pour m’avoir entrevue au prétoire !
— Eh bien !… (L’inspecteur eut un sou-rire affable, puis, vite, se rendant compte qu’elle ne pouvait l’apprécier, essaya de l’exprimer par son intonation.) Eh bien ! sait-on jamais avec ces jeunes personnes. Peut-être voulait-elle tout simplement un autographe.
— Un autographe, fit miss Pebmarsh subitement méprisante. Puis : Oui, ajouta-t-elle, oui, vous devez avoir raison. Ça se fait souvent. Mais aujourd’hui, monsieur l’inspecteur, il n’en a pas été question. Depuis que je suis rentrée, personne n’est venu. (A suivre…)
D’après Agatha Christie
26 juin 2011
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