Hommes et femmes au destin prodigieux
K. Noubi
Résumé de la 67e partie n Après avoir fait réparer son bateau, Charcot et son équipage reprennent la mer, en direction du sud. Il était impatient de repartir.
Quinze septembre 1936, quatorze heures.
Il fait beau, mais Charcot sait qu’il ne faut pas trop se fier au ciel bleu et à la mer d’huile : les tempêtes se lèvent sans s’annoncer. Et c’est ce qui va se produire effectivement une heure après.
Charcot et son second, Le Conniat, regardent la mer qui commence à s’agiter. Le ciel aussi a commencé à s’assombrir.
— ça sent la tempête ! s’exclame le second.
— Espérons que ce ne sera pas violent, répond Charcot, et que ça passera vite.
Les deux hommes ne disent rien pour ne pas alerter l’équipage qui vaque normalement à ses activités.
Brusquement, la tempête éclate. Un coup de vent violent emporte l’antenne de radio et brise le mât de misaine. Le navire est frappé par une vague puissante, puis soulevé par une autre, haute de plusieurs mètres. Les marins hurlent.
— Ne craignez rien, crie Charcot, le «Pourquoi-Pas», tiendra !
Ce n’est une phrase lancée en l’air, pour donner confiance à son équipage : c’est une réalité. On a choisi, pour construire le bateau, le meilleur bois, le chêne, et le «Pourquoi-Pas» a déjà fait la preuve de sa solidité, en bravant plus d’une fois la tempête. Mais pourra-t-il, cette fois-ci, résister à un ouragan de cette puissance ? Pour le moment, à part les avaries signalées, le navire tient le coup. Charcot et Le Conniat espèrent que l’ouragan va se calmer.
Mais loin de se calmer, il redouble de violence. Sa force est telle qu’il entraîne le bateau vers la côte. si on l’arrête pas, il risque de se fracasser sur les rochers.
— Quelle est la direction du vent ? hurle Charcot.
— sud-Ouest ! crie Le Conniat.
— alors il faut aller vers le Nord-Ouest !
Les deux hommes vont essayer la manœuvre, s’accrochant désespérément au gouvernail.
Les deux hommes, tout en actionnant la pièce, jettent des coups d’œil désespérés à la mer. Elle n’a plus de forme : ce n’est plus qu’une masse sombre qui se soulèvent, se creuse puis se soulève de nouveau. Les marins, effrayés, courent sur le pont, certains sont jetés par terre, mouillés jusqu’aux os par les puissants jets d’eau.
— ça va passer, ça va passer ! hurle Charcot, tenez bon !
Mais il sait qu’il est difficile de tenir dans le fracas assourdissant de ces vagues qui ne cessent de grossir.
— La machine… dit Le Conniat.
— On ne peut pas forcer plus sur les feux ! répond Charcot, elle risque d’éclater. C’est maintenant qu’il comprend qu’il aurait dû changer cette machine devenue trop vieille.
Ce n’est pas une négligence, mais il manquait de moyens. Le gouvernement, lui, en avait les moyens mais il n’a pas prévu de subventions pour le changement de la chaudière.
— On hisse la cape, finit par dire Charcot.
Cela signifie que l’on va se laisser dériver en tentant de se protéger des lames.
A suivre
K. Noubi
21 juin 2011
Histoire