Cela s’est passe un jour/ Aventures, drames et passions celebres
Hommes et femmes au destin prodigieux (67e partie)
Par K. Noubi
Résumé de la 66e partie : Le «Pourquoi-Pas ?» effectue des expéditions et transporte aussi des missions ; mais le bateau a une avarie importante. Aussitôt réparé, il se lance de nouveau sur les mers.
Fin août 1936 Jean-Baptiste Charcot s’apprête à quitter la côte groenlandaise. Une dernière fois, comme pressentant qu’il ne reviendrait plus dans cet endroit merveilleux, il a assisté au coucher, puis au lever du soleil et retenu son souffle devant le spectacle féerique du rougeoiement de l’astre sur la glace. Il a aussi admiré les formes fantastiques que la nature a sculptées dans la glace et qu’il s’est amusé à déchiffrer : cygnes élégants, lions rugissants, troupeaux de moutons et d’éléphants, corps de femmes étendus… Puis il a fallu s’arracher au spectacle, partir, pousser vers le sud. Il aurait pu prendre la route de l’Europe, rentrer chez lui, pour se reposer, mais il ne veut pas rentrer tout de suite en France. En effet, depuis quelque temps déjà, il est atteint par la limite d’âge et il craint que cette fois-ci, on le mette d’office à la retraite. D’ailleurs, le second qu’on lui a attribué, La Conniat, ambitionne de le remplacer. Mais pour le moment, Charcot est le maître à bord et c’est lui qui décide s’il faut rentrer ou continuer à vagabonder par les mers.
Le temps est beau, la mer calme. Le voyage a tout l’air de bien se dérouler. Mais c’est compter sans le mauvais sort et surtout la perfidie des hommes. Le charbon qu’on a vendu à Charcot est de mauvaise qualité : il contient du grisou, un gaz qui fait exploser la chaudière qui est déjà vieille.
On essaye de la réparer mais on n’y parvient pas. On lance alors un appel au consul de France à Reykjavik qui envoie aussitôt un avis, c’est-à-dire un petit navire escorteur.
Le «Pourquoi-Pas ?» est remorqué au port danois où on le donne aussitôt pour réparation. On pense que l’avarie n’est pas grave et on se met à l’œuvre.
— Etes-vous sûr de réparer tout de suite ? demande-t-il aux mécaniciens.
— Ne vous inquiétez pas, lui répondent-ils, ce sera un jeu d’enfant.
En effet, en un temps record, on «arrange» la chaudière. Charcot est content car il pense repartir aussitôt. Mais il faut effectuer des essais. La chaudière qu’on venait de réparer ne tient pas le coup et craque de nouveau. Les ingénieurs sont désolés mais l’avarie est plus importante que prévue, il faut tout recommencer et cette fois-ci, les travaux traînent en longueur.
Charcot est constamment sur le chantier et presse les ouvriers.
— nous n’avons pas fini !
— il faut faire vite, je vous prie, je dois reprendre la mer !
La saison est bien avancée, il doit repartir avant les grandes tempêtes de l’hiver qui secouent l’Islande. Il n’a pas peur, lui, de braver le mauvais temps et il a confiance dans le «Pourquoi-Pas ?» mais il ne veut pas faire courir de risques à son équipage. Les ingénieurs danois achèvent enfin les réparations. Il consulte son second, Le Conniat, qui lui dit qu’il est d’accord pour appareiller.
«Mais il faut partir tout de suite ! Il faut s’éloigner sans tarder de l’Islande, si on ne veut pas être surpris par quelque tempête !»
Charcot n’attend que cela. Il donne le signe du départ et le «Pourquoi-Pas ?» se lance de nouveau sur les mers. (A suivre…)
K.N
21 juin 2011
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