13.“La prison du silence” /La nouvelle de Adila Katia

Edition du Dimanche 31 Janvier 2010

Des gens et des faits

“La prison du silence”

La nouvelle de Adila Katia

RÉSUMÉ :  Leïla se rend en ville où elle fait des achats. Elle passe ensuite chez une coiffeuse. Elle ne se reconnaît presque pas. La coupe la rajeunit. Elle se presse. Fateh doit l’attendre pour rentrer ensemble. Une fois arrivée, elle le surprend avec une amie…

13eme partie

Leïla ne s’approche pas. Fateh l’a regardée à deux reprises avant de se tourner vers la jeune femme assise près de lui. Apparemment, ils se querellaient.
Leïla reste un bon moment près de la voiture, ses paquets à la main. Passent quelques minutes avant que la jeune femme ne descende de la voiture. Leïla a eu le temps de la regarder, une grande et mince brune qui n’a aucun charme. Leïla en est arrivée à se demander ce que Fateh pouvait bien lui trouver d’attrayant.
Leïla sursaute quand Fateh démarre.
- Hé ! crie-t-elle en levant le bras, quelques paquets tombent sur le trottoir, attirant l’attention de Fateh qui ralentit.
Il se penche vers l’autre portière et baisse la vitre. Il ne l’a pas reconnue.
- Oui ?
- Fateh ! Tu as failli me laisser, lui reproche-t-elle en ouvrant elle-même la portière, déposant à l’arrière les paquets. Ne me dis pas que tu ne m’as pas vue ! J’attends depuis un quart d’heure !
Leïla s’assoie à l’avant et claque la portière. En se tournant, elle croise le regard de Fateh.
- Sûr que je t’ai vue, lui dit-il. Mais je ne t’ai pas reconnue. Tu es transformée par cette nouvelle coupe. Tu es très belle comme ça, je me demande ce que mon frère a trouvé de meilleur que toi !
- Il a toujours rêvé de partir et de se marier avec une “étrangère”, répond-elle, alors qu’il démarre. On passe prendre les enfants ?
Fateh hoche la tête, tout en empruntant la route menant au lycée. Ils passeront récupérer Maya puis Hakim.
- C’était ton amie ? l’interroge Leïla.
- Oui, on a l’intention de se marier, lui apprend-il. Dès qu’on aura acheté un appartement !
- Et que deviendra-t-on sans toi ? demande-t-elle, légèrement inquiète.
- Oh, ce n’est pas pour demain, la rassure Fateh. D’ici là, Hakim aura peut-être même terminé ses études à l’université !
Leïla soupire. Elle ignore pourquoi, mais le fait de savoir que son beau-frère a une amie avec qui il projette de se marier la rassure. L’antipathie inexpliquée qu’éprouve Maya pour son oncle l’avait marquée au point de l’inquiéter. Il a été souvent vu des cas incestueux et Leïla y a pensé. Peut-être que quelque chose se passait à son insu ?
Maya lui avait parlé de danger à sa proximité. Cela aurait pu être vrai. Mais le fait que Fateh ait une amie prouve que Maya s’angoisse pour rien. Ce n’est pas parce qu’il la gâte et la câline, avant bien sûr, qu’il avait un penchant pour elle. C’eut été monstrueux.
- Il faudra que tu l’invites à la maison, lui dit-elle. Cela fera plaisir aux enfants !
- Inch Allah !
Hakim les attendait dehors en compagnie de Maya qui l’avait rejoint. Tous deux prennent place à l’arrière parmi les paquets.
- C’est pour nous tous ça ? plaisante Hakim.
Leïla se tourne en souriant.
- Quelques-uns seulement, lui répond-elle. Dommage, dit-elle à l’intention de Fateh. On aurait dû inviter ton amie à déjeuner !
- Elle est comment maman ? l’interroge son fils.
- Mon jugement importe peu, répond sa mère. Si Fateh l’a choisie, c’est qu’elle est digne d’intérêt.
Près d’une demi-heure passe avant qu’ils n’arrivent à leur village. Leïla remarque que Maya est plus détendue. Elle aide même à préparer le déjeuner. Il est bien rare qu’ils déjeunent ensemble en cours de semaine. D’ordinaire, Hakim et Maya n’arrivent qu’à trois heures, vu qu’il y avait un problème de transport.
- Tu vois, tu t’es inquiétée pour rien, glisse Leïla à Maya.
La jeune fille hausse l’épaule et le temps de quelques secondes, elle était devenue écarlate.
- Je le souhaite de tout cœur, murmure-t-elle. Sinon ma vie deviendra un vrai cauchemar. Si j’ai à vivre avec ses angoisses. Souhaitons qu’il va se marier et partir d’ici. Ce ne sera qu’à ce moment que je serais réellement rassurée !

A. K.
(À suivre)