Edition du Mardi 16 Février 2010
Culture
Le jeune chanteur, auteur, compositeur Rahim vient de nous quitter
Reflet culturel
Par : ABDENNOUR ABDESSELAM
Rahim, voilà le nom d’un jeune chanteur vénéré par la jeunesse kabyle pour ses textes empreints d’appel accompagné de mélodies dont lui seul avait le secret de la composition.
Il me dira un jour que la base de sa musique est le chant de l’eau qu’il va souvent écouter à la fontaine ou aux abords d’une rivière. Il nous quitte à la fleur de l’âge non sans avoir légué un répertoire assez aménagé et à destination d’une jeunesse en quête d’une voix pour satisfaire ses longues et nombreuses attentes. Mammeri lui-même disait que “le poète satisfait en nous les secrets de nos désirs non exprimés mais exprimés par d’autre pour nous”, et Rahim a été justement cette voix (l’une des voix) qui a exorcisé les rêves les plus enfouis dans la possession de tout dire.
Autant dire qu’il a été un des miroirs d’une jeunesse qu’il a su assouvir et, donc, protéger contre toutes sortes d’invasions, le pus souvent inutiles et astreignantes. Rahim était proche de son public. Ses sensations viennent de son vécu quotidien, constamment en contact , en côte à côte avec lui, aussi bien en émigration qu’en Kabylie. Il avait une force d’écoute particulière qui lui a servi à restituer à ses auditeurs, à ses fans, la réalité pressante, celle de l’exigence du désir qui chasse le désespoir. Loin des épanchements et des effusions qui se fanent dans les jardins négligés, Rahim sollicite et investit la vie sociale qui lui a permis d’être dans le temps et non en dehors du temps. En phase avec le temps, il avait horreur de la vie sans issue, de la vie sans expression mais surtout de la vie devenue plus un fardeau qu’une portion de temps à vivre. Il “fusil” les détours métaphoriques pour rendre la liberté à la parole envoûtante et au verbe aéré portés par une voix frêle, fragile et puissante en même temps. Ses compositions sont d’une liberté qui échappe à toutes les captures sociales. Dans Yagh ad am inigh (écoute puisque nous nous aimons), la vogue s’enchevêtre avec un élan musical qui ne cessera de résonner encore chez cette jeunesse très attristée par sa disparition tragique qui arrive au détour d’un album en finition. Il a été enterré, hier lundi, près du village d’Akaoudj et la neige blanchira sa tombe.
à Dieu l’artiste.
A. A.
kocilnour@yahoo.fr
17 juin 2011
Non classé