Edition du Mardi 16 Février 2010
Des gens et des faits
Maya
La nouvelle de Yasmine Hanane
RÉSUMÉ : Maya avait reçu une bonne éducation. Elle était une brillante élève qui avait décroché ses diplômes sans trop de difficultés. Samia avait tenu à ce que sa fille reçoive le maximum de culture et de savoir. La jeune fille qu’elle était devenue devrait renouer avec sa culture et sa famille…
71me partie
Après son 18e anniversaire, Maya, n’y tenant plus, demande à sa mère de lui raconter enfin tout ce passé dont elle ne connaissait que quelques bribes. Samia lui avait décrit la villa dans laquelle elles avaient toutes les deux vécues jusqu’à leur départ en Europe, ses relations avec sa famille, et quelques bons souvenirs qu’elle évoquait avec des larmes plein les yeux.
Il était temps donc pour Maya de renouer avec ce passé, qui en fait, consistera à déposer la base de son avenir.
- J’ai décidé de rentrer au bled dès cet été, lui dit Samia. Qu’en penses-tu Maya ?
La jeune fille ébauche un sourire radieux :
- Mais je n’attendais que ça depuis des années. Je suis pressée de connaître ma famille et surtout de rencontrer mon père.
Samia sourit. En fait elle-même voulait revoir Djamel. Ne serait-ce que pour lui demander pardon. Oui. Elle lui doit un peu ça. Mais tout de même, ce sacrifice qu’elle avait fait, n’était que pour le décider à prendre sa vie en charge. Tant pis, Djamel n’avait pas voulu prendre une autre femme et avoir d’autres enfants. Si toutefois il l’avait fait, Samia n’en aurait été que plus heureuse pour lu. Elle-même avait reçu des dizaines de demandes en mariage. Elle était encore jeune et attirante. Mais à chaque fois, elle répondait à ses prétendants, qu’elle était déjà mariée. En fait, c’était la réalité. Djamel et elle n’avaient jamais divorcés. Il ne l’avait jamais accepté. Et maintenant, il était trop tard pour revenir en arrière. Djamel ne divorcera pas. Pas maintenant. Quatorze années sont passées depuis leur séparation. Jamais il n’avait consentit à prendre femme ou à divorcer. Elle avait su par le biais d’un message sur son e.mail que son beau-père n’était plus de ce monde et que sa belle mère était malade et impotente. Qui s’occupait donc d‘elle se demande Samia ? Djamel a-t-il engagée une femme pour la prendre en charge ?
Elle pousse un long soupir puis constatant que Maya attendait toujours sa réponse, elle s’approche d’elle et entoure ses épaules de son bras.
- Ton père m’appelait “sa poupée de sucre”.
Maya sourit.
- C’est mignon. Mais puis-je savoir pourquoi ?
Samia hoche la tête.
- Oui. Un jour j’étais dans une pâtisserie pour acheter des gâteaux. En fait, c’était un jour particulier. C’était le jour où on venait demander ma main.
Maya, les oreilles grandes ouvertes, n’osait interrompre sa mère qui se lançait dans le récit sans fin de sa rencontre avec son père, de leur mariage, de sa naissance, et des évènements qui avaient suivis. Samia racontait en essayant de n’omettre aucun détail. Mot après mot, Maya reconstituait le puzzle de son existence. Elle comprit enfin les raisons qui avaient poussé sa maman à agir de la sorte. Elle avait compris le prix de son sacrifice et les souffrances qu’elle avait endurées par amour pour son père. À la fin du récit, elle se jette dans les bras de sa mère et se met à sangloter sans interruption. Samia lui caressait les cheveux. Elle avait enfin “vidé” son cœur et rassuré sa conscience. Maya comprenait. Elle était en âge de comprendre les motivations de sa maternelle à s’éloigner de sa famille et de son pays. Elle s’était estimée en droit de gérer l’avenir de son mari qu’elle aimait par-dessus tout. Et ce geste d’amour, Djamel l’avait compris. C’est pour cela qu’il n’avait jamais voulu d’une autre femme.
Y. H.
(À suivre)
17 juin 2011
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