Edition du Samedi 04 Juin 2011
Des gens et des faits
Les racines de l’amour
La nouvelle de Yasmine Hanane
Résumé : L’attente durait. On était déjà au milieu de l’après-midi et aucune nouvelle ne parvenait du village. Inquiète sur son sort et pour les siens, Ghenima n’avait rien pu avaler depuis deux jours. Une vilaine migraine la taraudait. Sa mère voulut la rassurer et à ce moment Mokrane se réveille.
42eme partie
Zouina se lève promptement :
- Va voir ce qu’il veut. Il est encore dans les vapeurs de l’alcool et ne pourra même pas se lever de sa couche.
Zineb se lève et se dirige vers sa chambre. On entendit Mokrane lancer des grossièretés, puis l’insulter, elle et sa famille.
Au bout d’un moment, le calme revient, et Zineb réapparaît :
- Il voulait juste un verre d’eau. Il s’est rendormi.
Zouina hoche la tête :
- Il a fait encore des siennes. Nous l’avons entendu, tout le voisinage a dû l’entendre.
Zineb baisse les yeux. Mokrane l’insultait ou la battait chaque fois qu’il était dans cet état. Combien de fois s’était-elle enfuie chez ses parents, pour éviter l’humiliation dont elle faisait l’objet devant la famille et les voisines. Mais chaque fois, il revenait à de meilleures intentions, et venait la récupérer. Bien sûr, c’étaient toujours les enfants qui souffraient de cette situation. Elle les laissait chaque fois livrés à eux-mêmes dans la maison de leur père. C’était bien sûr Zouina ou Ghenima, ou même sa belle-sœur Fatiha qui s’occupaient d’eux, jusqu’à ce qu’elle réintègre son foyer. La situation devenait parfois intenable lorsqu’elle jugeait préférable de revenir définitivement sous le toit paternel. Ses parents s’ils comprenaient fort bien les raisons qui poussaient leur fille à avoir de telles idées, refusaient cependant de la voir revenir chez eux, de surcroît avec ses enfants. Zineb n’avait donc plus le choix. Elle avait fini depuis longtemps par battre en retraite, et accepter son sort.
Pourtant en dehors des ses écarts, Mokrane était un brave homme. Il savait la gâter, la faire rire, lui acheter des cadeaux, et l’emmenait de temps à autre en ville où elle s’extasiait devant les merveilles étalées dans les grandes vitrines des magasins.
Après ces escapades qui duraient souvent toute une journée, elle revenait au village, et racontait durant des jours, à toutes les femmes qu’elle rencontrait, que loin de leurs montagnes, se trouvait un autre monde. Un sanctuaire de richesses, et de merveilles. Les femmes portaient des cheveux courts, ou mi-longs, et des tenues belles à vous couper le souffle. Elles avaient les joues et les lèvres peinturlurées, et mettaient des chaussures à talons.
Les femmes l’entouraient et lui posaient mille et une questions sur la ville et ses secrets. Fière alors comme une reine, Zineb se mettait même à inventer des rencontres avec des citadines, qui lui promettaient de venir lui rendre visite dans leur village. Quelques femmes la crurent au début, mais finirent par comprendre que Zineb avait été contaminée par la folie des grandeurs, et qu’en dehors des quelques quartiers qu’elle a dû à peine fouler, elle n’avait parlé à aucune femme de la ville. Mokrane ne l’aurait d’ailleurs jamais toléré. S’il se rendait de temps à autre dans la grande ville, c’était pour faire des achats ou réparer des outils.
(À suivre)
Y. H.
17 juin 2011
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