Edition du Lundi 02 Mai 2011
Des gens et des faits
Kamelia
La nouvelle de Adila Katia
Résumé : Maria est désolée de ne pouvoir rien faire pour sa belle-fille. Son fils est un cas unique, aimant seulement ce qui est beau et fort. Il ne veut pas entendre parler de son dernier, Rahim, dont la vie est en danger. Kamélia ne le lui dit pas. Il n’en serait qu’heureux.
12eme partie
-Tu aurais dû le laisser à l’hôpital, lui dit-il. Il ne mérite pas de vivre.
- C’est à Dieu de décider, rétorque la jeune mère avant de le prier de la laisser aller veiller son fils. Il a besoin de dormir, de beaucoup de calme !
- Il y a sûrement un coin dans le cimetière du quartier. Personne ne viendra le déranger là-bas, lui assure Brahim tout en prenant Karim dans ses bras, à peine est-il sorti de sa chambre, refrénant son envie de s’approcher du berceau où dormait Rahim. Kamélia voit des questions dans ses yeux. Le cœur serré, elle constate que pour plaire à son père, il se retiendra et ne regardera son frère que de loin. Il n’y aura pas de lien entre eux. Elle le regrette. Tout cela était de la faute de son mari. Mais comment aurait il pu en être autrement ? Un être aussi égoïste que lui ne pouvait représenter que le pire des modèles. Kamélia prie pour que le fond de son fils ne soit pas aussi mauvais que celui de son père. Si Rahim n’était pas aussi malade, elle se serait faite une joie de s’imposer entre eux et aurait tout fait pour gâcher leur relation. Elle ne supportait plus cette complicité entre eux. Kamélia se promettait de tout changer mais après.
Dans sa tête, elle était convaincue que son bébé ne tiendra que quelques jours encore. Le verdict des spécialistes, à ses yeux, est irrévocable. Rahim allait y passer, un jour ou l’autre. Cependant, les jours passés se comptabilisent en semaines puis en mois. Le bébé se révélait être un battant. Le pédiatre avait froncé les sourcils lorsqu’elle l’avait emmené pour une visite. Il n’en revenait pas. Le cœur battait irrégulièrement, parfois si faiblement qu’à l’oreille nue, les battements n’avaient pas été percevables.
- Qu’a dit le spécialiste ? veut savoir Brahim à leur retour de l’hôpital.
- Qu’à ce rythme, il sera centenaire, ment Kamélia qui refusait de lui avouer que lors de l’examen, le pédiatre était plutôt sceptique. ça te désole, hein ?
- Ce serait un miracle ! ironise Brahim. Mais pourquoi tes yeux sont tristes, alors ?
- Tu ne peux accepter l’avenir avec Rahim, dans le fond ça te tue ! dit-elle. Et moi je ne vis que pour lui !
- C’est sûr ! S’il est aussi mal fait, c’est entièrement de ta faute, lui assure-t-il. Tu l’as fait souffrir pendant toute la grossesse !
- Inutile de tenter de me culpabiliser, réplique-t-elle. ça ne marchera pas ! Rahim sent combien je l’aime ! Je serais la plus heureuse des mamans s’il reste parmi nous !
Ses prières semblent pouvoir le maintenir en vie mais ne peuvent le soulager des douleurs qui le réveillent la nuit. Les pleurs du bébé sont si forts que Brahim vient souvent cogner à la porte de leur chambre.
Car depuis la venue au monde de Rahim, Kamélia avait refusé de partager la couche avec lui. Cela fait six mois qu’ils faisaient chambre à part et tous deux semblaient avoir trouvé son compte. Karim dormait avec son père et elle se consacrait entièrement à Rahim.
- Si tu ne le fais pas taire tout de suite, je m’en chargerais ! menace-t-il.
- Il est souffrant ! lui crie-t-elle en larmes, espérant que cela le toucherait. Il est tout bleu… Mon Dieu ! pas ça…
Le bébé ne pleurait plus. Les yeux exorbités dans son visage devenu bleu semblaient s’accrocher à ceux de Kamélia. Elle était paniquée et ne savait plus quoi faire. Elle ne sentait pas son cœur battre.
- Non ! crie-t-elle en se mettant à le secouer, de colère, refusant de croire qu’il puisse être mort. Rahim ! Non !… Qu’est-ce que je vais faire sans toi ?
Le bébé a un hoquet, lui faisant prendre conscience qu’il est encore vivant. De soulagement et de joie, Kamélia qui ne veut pas le perdre, s’habille rapidement et prend son bébé dans le landau. Dans le couloir, elle est heureuse de ne pas tomber sur son mari. Il aurait tout fait pour la retenir mais n’avait pu l’arrêter. Surtout pas lui…
(À suivre)
A. K.
15 juin 2011
1.Extraits