Edition du Jeudi 28 Octobre 2010
Culture
Les belles démons : Ces femmes écrivaines au pays de “La Yajouz”! (2/3)
Souffles…
Par : Amine Zaoui
Cette technologie !
Par le phénomène Internet, par la magie de la tchatche électronique, elles ont découvert l’issue de la délivrance ! Une issue magique contre l’obscurité de cette vaste prison. Une évasion,
un chemin qui conduit vers le monde des autres, vers soi ! Les messages téléphoniques ou “SMS” apportent le rêve, véhiculent le “feu” et ravivent la flamme de la vie ! La flamme ! Les choses changent, la langue et les comportements aussi. La voix de l’homme, par Internet ou par téléphone portable, arrive jusqu’au lit, surgit à n’importe quelle heure ! L’apocalypse ! La flamme ! Les messages d’amour “pleuvent”, imbibés de désir ! L’homme, le démon est derrière un rideau transparent ! Un drap !
L’homme est dans le verbe ou dans la peau : l’homme rêvé. Le monstre poétique !
Ce monde de l’Internet, de la tchatche et d’échange de messages téléphoniques constitue l’univers romanesque de Banat Riyad (Filles de Riyad) de Rajaâ Al Saneê, l’écrivaine la plus connue dans le pays du Prophète (QSSSL) : l’Arabie saoudite et dans le monde arabe. Dans son best-seller Filles de Riyad, édité en 2005 à Beyrouth (cinq éditions en moins de dix-huit mois, un tirage phénoménal), Rajaâ Al Saneê décrit la vie de quatre filles rêveuses et dont le rêve n’est qu’une quête d’hommes et des libertés.
Filles de Riyad est un texte sur la déception féminine, l’hypocrisie masculine, les tricheries sociales, les tromperies conjugales, dans la terre native du Prophète QSSSL.
Filles de Riyad est l’image d’un monde féminin bouleversé, dans un pays de conventions. Une femme couve ses enfants au moment où son mari est dans les bras d’une autre. Une femme est divorcée parce qu’elle est tombée enceinte sans l’autorisation de son homme, ce dernier a un projet de mariage et beaucoup de fréquentations extraconjugales. Des “marchés” de mariage, la traite contemporaine.
Filles de Riyad est un texte de souffrance qui se termine par le cri d’une fille : “Je quitterai ce pays qui nous considère comme du bétail. À quoi sert-elle, cette vie où on m’impose ce que je dois faire et ce que je ne devrai pas faire.”
Elles accusent !
Dans un pays où règne la culture de la poésie traditionnelle, le roman féminin saoudien est né dans le scandale, contre le scandale. Le roman accuse les censeurs et casse les interdits dans le pays de tous les interdits.
Après la sortie de Filles de Riyad, la romancière Rajaâ Al Saneê a été qualifiée par les islamistes wahhabites d’ennemie farouche de l’islam.
Filles de Riyad est un texte-cri féminin dans un monde où les maîtres sont des hommes, ceux qui ont la mainmise sur la vie et sur les vivants.
Rien n’arrête le désir à la liberté chez la romancière. Elle décrit avec courage la vie des femmes lesbiennes dans une société de tricherie et de mensonges.
“Gamra est accusée par son mari d’être frigide et distante.”
“Michèle est une révoltée contre la société conservatrice et contre le pouvoir masculin.”
“Sadim vit librement, mais en cachette, sa vie sexuelle avant le mariage.”
“Lamis entretient la connaissance d’une dizaine de jeunes hommes à travers Internet et le téléphone portable.”
A. Z.
aminzaoui@yahoo.fr
5 juin 2011
Contributions