Edition du Lundi 29 Novembre 2010
Des gens et des faits
L’Algéroise
La nouvelle de Yasmine Hanane
Par :Yasmine Hanane
Résumé : La grande maison change de propriétaire. Désormais, c’est Si Tayeb qui en aura la charge. Il rassurera tout le monde. Personne ne quittera les lieux sans sa propre volonté. Lla Kheïra exploite cette occasion pour démontrer qu’elle est la patronne de ces lieux…
26eme partie
Elle avait fini par réunir toutes les femmes dans la grande cour et leur avait tenu un discours assez pimenté. C’est elle la femme du propriétaire et c’est à elle qu’échoit l’entretien de l’intérieur de la maison. Gare à celle qui fera la sourde oreille.
- Je n’aimerais pas avoir vos enfants dans les jambes, ni vos jupons étendus dans la cour. Que chacune de vous se débrouille pour descendre très tôt faire sa lessive afin que le linge soit étendu sur la terrasse avant le milieu de la journée. Au crépuscule, il faut que la terrasse redevienne aussi nette qu’au début de la journée.
- Mais si le linge n’est pas encore assez sec ?
- Là n’est pas mon problème. Si Tayeb vous demande à tous de veiller à l’entretien de la maison. Rendez donc grâce à Dieu qu’il consente à vous garder sous son toit.
Les voisines se regardèrent. Si Tayeb ne savait pas que sa femme tenait ce discours. Il n’aurait jamais oser faire des remarques aussi biscornues devant un parterre de femmes qui habitent, pour la plupart, dans cette grande maison depuis plusieurs années.
Enfin fatiguée d’avoir toute la journée imposer sa dictature, lla Kheïra revint chez elle. Fettouma était occupée à plier du linge et chantonnait d’un air joyeux.
- C’est ta mère qui se marie ! lui lance-t-elle sans trop de gêne.
- Hein ?
- Pourquoi chantes-tu donc Fettouma cette vieille litanie ?
- Oh, c’est un air qui m’est venu comme ça.
- Et ce linge, tu n’as pas fini encore de le plier ?
- Mais je viens à peine de le ramasser.
Lla Kheïra prend son air courroucé que Fettouma ne connaissait que trop :
- Et qu’avais-tu donc attendu pour le ramasser plus tôt ?
- Il n’était pas encore sec, je…
- Tu… Tu… Je ne comprends plus rien à ton manège de fille gâtée. Désormais, tu iras étendre le linge dès les premières heures du matin sur la terrasse comme toutes les voisines. C’est fini pour la cour, je vais planter du jasmin dans tous les coins pour camoufler ces odeurs nauséabondes qui imprègnent les lieux.
Fettouma allait riposter quand, tout d’un coup, elle se sentit mal. Une nausée la surprend et elle courut se soulager dans le grand bassin de la cour.
Lla Kheïra la suit :
- Qu’as-tu encore ? Hier, tu avais des maux de tête et aujourd’hui…
Elle ne termine pas sa phrase. Fettouma s’affale de tout son long sur les dalles fraîches de la grande cour.
Des voisines accoururent. Lla Z’hor était absente ce jour. La jeune femme est vite entourée. On la relève et on l’emmène dans sa chambre, où on l’allongera dans son lit avant de lui asperger le visage d’eau.
- Je vous avais bien dit qu’elle était fragile de santé, lance lla Kheïra tout en s’emparant d’un flacon d’eau de roses qui trônait sur la coiffeuse.
Fettouma reprend connaissance. Elle se relève et tente de s’asseoir sur son lit, mais un vertige l’oblige à se rallonger.
Une vieille voisine sourit :
- Ghir el-khir lla Kheïra. Ta belle-fille est enceinte.
à suivre
Y. H.
5 juin 2011
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