Un jour un père fut interpellé par son fils encore adolescent sur la signification d’un mot qui revient souvent dans les discussions qu’il a avec les adultes.
L’Enfant est persuadé qu’à chaque fois que ses questions deviennent pressantes pour son interlocuteur ce dernier y met un terme en invoquant le système. Tout ce qui échappe à la raison est imputable au système, tout ce qui heurte les valeurs les plus élémentaires est imposé par le système. l’impuissance devant des phénomènes nuisibles est due à la puissance du système.
Mais qu’est ce que le système ? le père qui use lui-même et plus souvent qu’à son tour de ce terme est désarçonné par la question de son rejeton. Le système, il le perçoit bien mais il ne trouve pas de mots pour exprimer ce qu’il ressent.
Il utilise si souvent l’expression que la fréquence de l’usage a chassé le besoin du sens.
Face à la question, il se sent tout à fait démuni. Si elle avait été posée par un autre que son enfant, il aurait soupçonné une colle, une tentative de déstabilisation et aurait trouvé une parade. Mais, là, elle est posée au père, de surcroit enseignant de métier; il ne pouvait y échapper.
Convoquant tous ses neurones il se remémore un fait qui allait peut être le tirer d’affaires.
Il rappelle à son fils qu’un jour, durant le dernier été, il l’avait envoyé acheter une pastèque chez un vendeur de ce fruit, qui occupe un local contigu à la maison, chaque saison estivale.
Le fruit, après ouverture, s’est avéré fade et insipide et a déçu toute la famille qui s’est regroupée autour de la table basse pour s’en délecter.
L’enfant qui a culpabilisé pour en avoir été l’acquéreur a voulu se rendre chez le marchand et lui réclamer un autre en réparation. Le père l’en dissuada, se rendit lui-même chez un autre vendeur et ramena un fruit dont la saveur fit vite oublier la mésaventure à toute la famille.
A ce moment personne ne prêta attention à son refus de faire la moindre réclamation au fournisseur indélicat. Lui-même n’éprouva pas le besoin de s’en expliquer.
Aujourd’hui, il pense que dans l’explication de sa démarche d’alors se trouve la réponse à la question de son fils.
S’il n’a pas réclamé au premier vendeur un autre fruit c’est tout simplement que le vendeur avait en toute logique acquis ses fruits chez le même producteur et qu’il était peu probable que les produits d’une même récolte aient des saveurs très différentes
Auquel cas même de très bonne volonté ce qui est improbable – le marchand ne pouvait satisfaire, l’exigence du client sur ses propres disponibilités.
Il est certainement édifié sur la qualité de sa marchandise, mais, il continuera à l’écouler aux primo-acheteurs, à ceux qui croient naïvement à la loi des grands nombres en revenant acheter très souvent pour tomber sur le produit satisfaisant et à ceux qui ne veulent pas faire d’effort pour aller plus loin que le premier étal.
Entre le producteur qui n’a pas dû, en toute logique, être très regardant sur la qualité de la semence et de l’eau et qui a dû être avare en soins de culture et le distributeur arrangé par le prix d’acquisition il y’a une entente tacite qui fonde tout le système.
Un partenariat dans la logique n’est pas et ne peut être au service du consommateur.
Mai la parade qui consiste à éviter le circuit décevant pour se rabattre sur un autre est-elle une solution durable ?
Cette esquive n’est-elle pas la meilleure manière de contribuer à la perpétuation du système ?
Ne faut-il, plutôt, informer et persévérer dans la diffusion de l’information jusqu’à provoquer sa faillite au bénéfice d’un réseau plus vertueux ?
20 mai 2011
Contributions