RSS

La Barbe

La Barbe
Noir et blanc
Mustapha Mohammedi
Liberté : 07 – 11 – 2010

Ils étaient deux. Deux coiffeurs seulement au village, un Espagnol et un musulman, et chacun avait sa clientèle. Les Européens allaient tout naturellement se tondre les tifs chez M. Garcia et le tout-venant,

c’est-à-dire les indigènes, les laissés-pour-compte, les zawalis et tous ceux qui avaient une tête ou une barbe à raser à moindre coût venaient se faire bichonner la caboche au deuxième collège, chez l’artisan des “choumaras”.
Autant le premier était renfermé et taciturne, autant le second était tout le contraire. Volubile, spontané, tchatcheur. Pour un oui ou pour un non, il pouvait parler des heures. Il parlait, il n’arrêtait pas de parler, au point que nous avons fini par l’appeler Radio Paris.
Et encore, elle, on pouvait l’éteindre en appuyant sur un bouton. Pas lui. Il était au courant le bougre de tous les cancans du hameau, des secrets de l’alcôve. Il était capable de vous restituer avec tous les détails le moindre incident qui a opposé la veille, au bar de Mme Clou, des notables sur un sujet éminemment politique, la vertu de la fille du maire. Il connaissait les travers de toute la jet-set du canton. Le portier de la commune, un fieffé coureur, selon lui, le gardien du jardin public qui adorerait les veuves et le pinard, les Khodja des douars des noceurs et des flambeurs, et même le contre-maître de l’unique chantier qu’il soupçonne d’avoir fréquenté du beau linge dans une autre vie. Sur le plan international, il avait aussi son mot à dire. Tenez, il prétendait, par exemple, que le Premier ministre chinois, M. Chou en-Lai, était musulman. La preuve, expliquait-il, “chou en-lai est la déformation de n’ch’Allah”. Bref, il avait un avis sur tout… et surtout sur ce qui ne le regardait pas. La tête coincée entre un peigne droit comme un i et une paire de ciseaux mobile et assommée par la diarrhée verbale de son bourreau, le pauvre client n’avait que trois solutions : hocher de la tête en signe d’acquiescement, dodeliner de la tête en signe d’épuisement ou prendre carrément les jambes à son coup pour essayer de sauver sa tête.

À propos de Artisan de l'ombre

Natif de Sougueur ex Trézel ,du département de Tiaret Algérie Il a suivi ses études dans la même ville et devint instit par contrainte .C’est en voyant des candides dans des classes trop exiguës que sa vocation est née en se vouant pleinement à cette noble fonction corps et âme . Très reconnaissant à ceux qui ont contribué à son épanouissement et qui ne cessera jamais de remémorer :ses parents ,Chikhaoui Fatima Zohra Belasgaa Lakhdar,Benmokhtar Aomar ,Ait Said Yahia ,Ait Mouloud Mouloud ,Ait Rached Larbi ,Mokhtari Aoued Bouasba Djilali … Créa blog sur blog afin de s’échapper à un monde qui désormais ne lui appartient pas où il ne se retrouve guère . Il retrouva vite sa passion dans son monde en miniature apportant tout son savoir pour en faire profiter ses prochains. Tenace ,il continuera à honorer ses amis ,sa ville et toutes les personnes qui ont agi positivement sur lui

Voir tous les articles de Artisan de l'ombre

S'abonner

Abonnez-vous à notre newsletter pour recevoir les mises à jour par e-mail.

Les commentaires sont fermés.

Académie Renée Vivien |
faffoo |
little voice |
Unblog.fr | Annuaire | Signaler un abus | alacroiseedesarts
| Sud
| éditer livre, agent littéra...