Les Syriens sont seuls. On peut les tuer en masse, les exécuter contre le mur le plus blanc, les regarder mourir entre deux pubs sur des détergents ou les entendre crier avant d’éteindre sa lampe de chevet pour dormir. Presque personne ne s’en soucie, ni l’ONU, ni les Droits de l’homme version mondiale, ni l’opinion du monde, ni l’OTAN.
La cause est évidente : Bachar El Assad et son régime incarnent au mieux le statut de « dictature utile » qui a fait le bonheur des autres potentats dans la région. C’est « notre meilleur ennemi », comme l’a écrit un éditorialiste israélien dernièrement sur les thèses de la droite. Si le régime de ce Rat de Damas « tombe », c’est l’inconnu dans la région, c’est-à-dire pour les maîtres de la région et la possibilité de voir s’effondrer la ceinture de sécurité assurée par les dictateurs arabes depuis des décennies. La démocratie arabe est le pire ennemi de la droite israélienne (la gauche étant dans un malaise qu’elle ne dépasse pas) et la seule force des peuples sans armées fortes.
L’Egypte en offre le parfait exemple : à l’époque, on pouvait avilir ce pays en menaçant son dictateur, mais, aujourd’hui, on peut en tuer des milliers sans faire changer d’avis à des millions. Et c’est ce qui explique que les Syriens sont seuls : le frère sanguinaire de Bachar l’a bien dit à un journal américain : « Sans nous, c’est la menace contre Israël ». Message clair et direct. Le front de refus est une patate, le jeu d’assassins avec le Hamas, l’hébergement offert aux extrémistes, les alliances avec le Hezbollah et la danse de la hache à propos du Golan sont de la paillette et des arnaques alimentaires. Rien de tout ce qui nous été vendu n’est vrai : les tanks qui bougent à l’écran ne se dirigent pas vers le Golan mais vers Daraa pour tuer des Syriens. Tellement et si souvent que le chroniqueur n’arrive plus à suivre l’évènement sur les écrans sans avoir envie de traverser la télé et jeter la plus grosse pierre sur la tête de ce Rat. Les Syriens sont tués avec froideur, dans le dos du monde, comme s’il s’agissait de figurants, par dizaines. Ils font face avec un courage inouï à l’un des régimes les plus durs de la région et du monde. Le génocide n’en est qu’à son début et des charniers sont déjà découverts malgré les démentis grossiers des propagandes staliniennes de ce régime. Bachar est déjà tombé, ainsi que son frère Maher et leur cousin. Ce qui reste, c’est le sang sur les mains et des bataillons d’effectifs qui obéissent aux ordres de la minorité et des frères proches du Rat de Damas.
Ce qui reste, c’est la scène de courage et la vaste salle vide du monde entier qui mange des pop-corn. Près de mille morts, des centaines de disparus et des milliers d’arrestations en Syrie sans que cela soit encore compris et admis comme révolution et comme massacre. Tout cela parce que nos dictatures sont utiles à «leurs» démocraties et qu’un camp de concentration stable vaut mieux qu’une démocratie indocile et donc menaçante. Vu hier à la télé : une vidéo avec effet de zoom sur un dentier. Celui d’une vieille femme syrienne abattue par l’armée, froidement, parce qu’elle criait sa liberté. Il y avait du sang, un corps ramassé et ce dentier. Dieu, aidez-les ! Vous voyez tout. Et Youtube aussi.
18 mai 2011
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