Où ira Mouammar Kadhafi, Mohamed, selon l’ancien président cow-boy des States, Ronald Reagan, lorsqu’il avait ordonné de bombarder les toits de Tripoli ? Le point d’interrogation, jeté par les fenêtres d’Obama depuis la Maison-Blanche, a le mérite d’être clair pour ceux qui n’ont vu qu’un geste humanitaire dans l’intervention de l’Otan au-dessus de la Libye.
Le dernier encart publicitaire cosigné, en fin de semaine dernière, par le président américain et ses deux ministres des Affaires étrangères, Cameron et Sarkozy, a ce quelque chose de cynique dont seuls les nouveaux colons ont le secret.
«Le maintien du colonel est une chose impensable», pouvait-on lire en substance dans ce communiqué, ce qui est, à peu de chose près, la traduction littérale de: «Les Arabes nous ont ouvert la porte de la Libye, on y est, on y reste et on vous emm », outrepassant ainsi les termes de la résolution 1973 du Conseil de sécurité de l’ONU, dont l’objectif principal est uniquement la protection des civils. Un «déjà vu» qui s’est joué dernièrement en Côte d’Ivoire avec l’implication directe des soldats français dans l’arrestation de Laurent Gbagbo.
Maintenant que les questions existentielles ont été mises de côté, l’Amérique, pragmatisme oblige, s’interroge sur l’identité du pays où fourguer le colonel et spécule sur le deal avec la capitale-exil de l’auteur du Livre vert. Une vente concomitante, vu la date d’expiration du produit et sa dangerosité sur la santé publique, mais aussi sur le choix du drapeau qui accueillera la tente du Guide.
Plusieurs options sont sur la table ovale du président du Monde libre, qu’il étudiera sitôt sa partie de golf terminée. En première place, l’ex-Mecque de tous les révolutionnaires du monde, j’ai nommé Algiers, Alger pour les francophones. L’Algérie a été l’un des rares drapeaux arabes à condamner l’intervention militaire voulue par Paris, ce qui a fait dire à Belkhadem, le futur ex-patron du FLN, que la Ligue arabe, qui avait adoubé l’agression occidentale, n’avait aucune raison de continuer encore à exister. Un constat qui a dû faire beaucoup de bien à la centaine de millions de noms à consonance arabe qui peuplent les déserts arabes.
En deuxième position, l’Arabie Saoudite, puisque son roi a proposé à tous les dictateurs arabes déchus un bail dans l’un de ses palais. Sur la troisième marche du podium, ex æquo avec le Bahreïn, le Yémen de Salah qui se sentira moins seul dans sa quête à garder le palais présidentiel, ou encore la Jordanie. Egalement comme choix subsidiaires, le Venezuela de Chavez, le plus arabe des présidents de la planète, et la Bolivie.
Les destinations à éviter pour Kadhafi et sa famille, la Tunisie, l’Egypte, la Syrie, pas parce que ce dernier est un exemple de démocratie et que les citoyens qui n’aiment pas la tronche de Bachar ne se font pas zigouiller, mais parce qu’il y a un antécédent religieux avec la mort de Sadr, un imam chiite connu sur la place de Téhéran. Un assassinat qui a brouillé les relations de Kadhafi avec les capitales à haute sympathie chiite.
Sinon, il y a toujours La Haye avec sa résidence de luxe au TPI. Mais là, l’Amérique a dit non. En attendant sa nouvelle adresse, Kadhafi continue de voir mourir son peuple à Tripoli et Misrata.
12 mai 2011
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