Grève sur grève, et que le peuple crève ! On ne m’a pas donné le salaire que je veux, je fais grève. On ne m’a pas octroyé un logement, je fais grève. Le patron nommé par la tutelle ne me plaît pas, je fais grève. On a injustement licencié un salarié spécialisé en congés de maladie, je fais grève. On veut liquider l’entreprise qui nous a nourris pendant des années, et qu’on a coulée, j’fais la grève.
Les autres font la grève pour les soutenir, je fais la grève. Les autres refusent de faire grève, je ferai grève pour les obliger à faire grève. Pendant ma grève, des grévistes sont interpellés par les services d’ordre qui ne sont pas autorisés à faire grève, je pousserai la grève à fond.
Je suis discipliné, moi : dès que mon syndicat appelle à la grève, je réponds absent au boulot et j’fais la grève. La grève, ce n’est pas du repos, croyez-moi. La grève, c’est un engagement politique contre une pratique intolérable. C’est fatigant une grève parce qu’on sait toujours quand elle commence, mais jamais quand elle finit.
Quelle chance ! Pouvoir faire la grève, c’est souligner son statut de salarié. Il n’est pas donné à tout le monde de faire la grève. Un chômeur, par exemple, ne peut pas faire grève pour revendiquer un salaire. Ni il peut faire grève, ni il peut occuper les lieux de son chômage pour obliger sa tutelle à plus d’attention. Un chômeur, c’est moins qu’un mendiant. Le mendiant lui, s’il fait grève, tzaguette. Les moumnine, en sortant de la mosquée, ne pourront plus exhiber leur imène en offrant la pièce à ce gueux qui tend la main. Et le salarié qui fait la grève ne pourra jamais dire à celui qui lui demande une pièce : «Va te trouver un travail, tu es plus fort qu’un ferd !».
Mais que dire quand ce sont les maires qui veulent faire grève pour dénoncer leur mère-tutelle ? Ils revendiquent le maire, son statut de maire qu’il perd Disons-lui «chiche, bark-chiche !».
18 mars 2011
Contributions