Nadir est gros. C’est un petit gros plein de soupe, ni gentil, ni méchant, mais gâté. Il n’avait que quinze ans et il avait déjà la taille et le poids de quatre jeunes de son âge. De plus, il était fainéant, il ne faisait rien tout seul. Son problème est qu’il est enfant unique, wahdah
chez sa mère. Dès son jeune âge, elle se pliait à ses quatre volontés, satisfaisait tous ses caprices, lui donnait tout ce qu’il voulait, quand il voulait. Son père, c’était encore pire, il le nourrissait à la cuillère, le bichonnait comme la poule aux œufs d’or, mais celui-ci n’avait ni œufs ni or. «Ne te fatigue pas waldi, ana nwaklak, ana je t’habille, je te lave, j’étudie à ta place, je travaille et je te rapporte de l’argent, toi ya waldi koul, chrob, rgod, ne te fatigue pas
» lui disait-il, toujours. Et ce que fait Nadir depuis toujours. A trente ans, il ne travaille pas, il reste à la maison, tout le temps, mange, regarde la télé et ne sait rien faire, ni de ses mains, ni de sa matière grise. On dirait même qu’il n’a aucune matière grise. Son père et sa mère sont vieux et continuent pourtant à le traiter comme avant, comme quand il n’avait que six ans ou quinze ans, rien n’a changé, rien. Deux ans plus tard, son père et sa mère moururent dans un accident de la circulation. Il ne réalisa même pas ce qui venait d’arriver. Mais il commença à le sentir quand il commença à avoir faim, à avoir envie de se laver ou pour allumer la télé. Il chercha ses parents, mais ne les trouva pas. On lui dit qu’ils étaient morts, mais il ne savait pas ce que c’était que la mort. Un jour, on le trouva mort dans son lit. Il n’avait pas mangé depuis des lustres et il ne savait pas comment se débrouiller. Il avait été gâté par son père et sa mère et il est devenu
gaga, un légume. Ah, l’éducation.
24 janvier 2011
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