Le Carrefour D’algérie
Point de vue
Par Ahmed Meskine
Intellectuels absents.
A chaque fois que surviennent des troubles sociaux, on a tendance à juste titre d’ailleurs, à pointer du doigt les hommes politiques, les parlementaires, les partis et autres commis de l’Etat pour avoir failli à leurs missions, pour avoir fait preuve de manque de vision et de prévision. A juste titre, car ils sont impliqués d’une manière ou d’une autre dans la décision et détiennent le pouvoir pour changer l’ordre des choses.
Mais à y voir de près, il y va aussi de la responsabilité des intellectuels ou plus largement des universitaires dont le rôle est d’éclairer aussi bien les classes dirigeantes que le peuple sur les phénomènes qui risquent de nuire à la société ou de la sortir d’affaire.
Nous l’avons bien vu durant les émeutes, en dehors des espaces d’expression médiatique et particulièrement la presse écrite, qui n’ont ménagé aucun effort pour rapporter les faits et analyses, aucun autre espace dans le monde des «gens du savoir» n’a exprimé de point de vue. Pourtant, les différentes unions se disant indépendantes à l’instar de celle des écrivains, ont préféré le mutisme ou la timidité tout au plus, au moment où l’on s’attendait à une mobilisation ne serait-ce que pour confirmer et justifier sa présence, voire son existence. Juste pour dire que les intellectuels observent depuis leur «indépendance » et s’apprêtent à comprendre d’abord, expliquer ensuite. Ensuite, il faut faire face à son époque et ne pas lui tourner le dos pour verser dans une course inutile où la récupération n’a d’objectif que celui d’être appelé ou rappelé à un poste supérieur de l’Etat. L’Histoire quant à elle, est une bonne enregistreuse et n’y pénètrent par les jardins que ceux qui font preuve de courage et de prévoyance. Ceux qui laissent un témoignage et les preuves de leurs engagements aux côtés de leur peuple. Le statut de l’intellectuel est à ce prix et à ce prix sont aussi la notoriété et le rayonnement sur le monde des idées. Où est passée cette armée d’universitaires qui n’arrive pas à se mobiliser autour des grandes questions de l’heure et qui est censée proposer les chemins du changement avec ou sans idéologie. Les dernières émeutes, même si elles sont diversement appréciées, ont mis à nu les imperfections sociales et les déséquilibres où l’université et le monde dit intellectuel doit ou bien se redéfinir ou alors demeurer dans la médiocrité dans laquelle seuls comptent les augmentations salariales et le fonctionnariat.
14 janvier 2011
Contributions