Elle est là pointée depuis la nuit des temps sur son piédestal de gardienne du temple avec son œil de lynx, et rien ne lui échappe, même pas le bruit des mouches qui volent pendant la sieste. C’est une vraie mégère qui épie les claquements de portes,
les cris et les chuchotements. La médisance c’est son métier ; cette concierge, qui ne l’est plus, continue à régenter son monde comme la baronne des lieux, n’épargnant au passage aucune personne. Elle connaît les secrets les plus enfouis dans le vrai comme, surtout, dans le faux. Combien de fois n’a-t-elle pas été à la source de nombreux problèmes. De graves problèmes de ménage surtout et entre voisins de palier. Elle jette de l’huile sur le feu et n’a même pas peur des drames qui peuvent en découler. Elle est maigre comme une figue sèche et sa langue est aussi fourchue que celle de la vipère, personne ne connaît son âge ni son origine. Elle vit et respire le malheur. Vivant toute seule entre quatre murs et un esprit aussi noir que les abîmes de l’assombrissement. Jamais un mot gentil, et quand lui on lui rend la pareille, elle tombe dans l’hystérie en criant plus fort que tous. Elle ameute, elle scandalise et apitoie le plus téméraire quand elle réussit à inverser les rôles. C’est-à-dire devenir la victime et les autres ses bourreaux. Ainsi est faite la vie avec cette mégère qu’aucun n’a pu apprivoiser. Dire du mal des autres c’est leur renvoyer nos propres défauts. C’est une forme légère de la paranoïa pour dire que ce n’est pas nous les mauvais mais c’est les autres, donc, qui méritent tout notre courroux. Elle est jalouse du bonheur des autres. Une enfance malheureuse, un mariage court et dramatique et une vie faite d’immense solitude. Elle est comme ça, et la nature n’y peut rien. Il y a des gens qui pour mieux se défendre ne laissent apparaître que le côté sombre d’eux-mêmes.
13 janvier 2011
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