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Contribution : CONFÉRENCE L’initiative pionnière de formalisation d’un mouvement autour des droits de l’Homme en Algérie Par Arab Aknine

14 décembre 2010

Contributions

Dans le long cheminement historique qui a fait passer le statut de l’individu du stade négatif vers un stade positif, la Déclaration universelle des droits de l’Homme (DUDH) est une étape importante. La DUDH est considérée aujourd’hui comme la première affirmation mondiale de la dignité et de l’égalité pour tous les êtres humains. Au cours de l’histoire, les conflits, qu’il s’agisse de guerres ou de soulèvements populaires, ont souvent été une réaction à des traitements inhumains et/ou d’injustice.


Pourquoi «Déclaration» ?
L’idée même de « déclarer » des droits suppose que ceux-ci préexistent. Mais il était nécessaire de le rappeler parce qu’ils sont méconnus ou qu’ils sont violés, et l’ont été massivement avant et pendant la Seconde Guerre mondiale. Et en effet, c’était le cas de le dire.
La DUDH est née en 1948
Beaucoup de crimes ont été perpétrés pour que s’impose à la communauté internationale la nécessité d’appeler au respect des droits de l’Homme. A la fin de la Seconde Guerre mondiale (1945), l’humanité se réveille d’un cauchemar sans précédent avec ses atrocités révélées au grand jour et un bilan des plus lourds qui a jeté de l’effroi dans les consciences : plusieurs dizaines de millions de morts, de déportés, et des destructions de biens matériels. Cette Seconde Guerre mondiale, avec son bilan, a permis de sensibiliser toute l’humanité à la question de l’honneur de l’Homme et de l’Humanité. C’est dans ce contexte de chaos que l’ONU fut créée. Il était de l’honneur de la communauté internationale de ne jamais permettre de telles atrocités. Elle s’est fait un point d’honneur pour ne jamais les laisser se reproduire. Les responsables du monde de l’époque décidèrent de renforcer la charte des Nations Unies par une espèce de feuille de route garantissant les droits de chaque personne en tout lieu et en tout temps. La nécessité d’une paix durable était donc fortement ressentie et s’imposait à l’humanité. Cette paix durable ne pouvait être possible si les droits de l’Homme ne sont pas respectés. Le 26 juin 1945, une charte des Nations Unies a été adoptée (la Charte de San Francisco). Cette charte affirme une volonté de faire respecter le droits de l’Homme et les libertés fondamentales. Dans son article 68, la Charte de San Francisco annonce la création d’une commission des droits de l’Homme par le Conseil économique et social des Nations Unies. Cette commission a eu pour mandat d’élaborer la DUDH. Après trois mois de débats et de discussions, le texte définitif fut donc adopté par l’assemblée plénière réunie au Palais de Chaillot de Paris le 10 décembre 1948 par 48 voix (8 pays se sont abstenus). Trois évènements ont plus que d’autres déterminé la prise de conscience pour les droits de l’Homme et leur mise en œuvre. 1- La grande charte du 12 janvier 1215 et surtout l’accord du libre peuple d’Angleterre du 19 Mai 1649, suivi plus tard par l’Habeas corpus voté par le Parlement anglais en 1619. 2- La déclaration d’indépendance des Etats-Unis d’Amérique. 3- La Déclaration française des droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789. La DUDH a donc valeur d’une résolution qui engendre pour ses signataires une obligation morale et politique. Par la suite, elle a donné naissance à deux pactes importants élaborés le 16 décembre 1966 et adoptés, pour leur mise en œuvre, par l’Assemblée générale de l’ONU du 23 mars 1976 à New York. On peut aussi citer la Charte africaine des droits de l’Homme du 28 juin 1981. Cette déclaration/résolution tente de concilier les droits individuels et les droits économiques et sociaux. Elle est composée d’un préambule et de 30 articles. Le préambule fait de sept considérants annonce l’idéal que la DUDH se proposait d’atteindre. Les trente articles allant des principes généraux de liberté, d’égalité et de non-discrimination (article 01 et article 02) jusqu’aux relations entre individu et société (de l’article 28 à l’article 30).
Historique des droits de l’Homme en Algérie
L’affirmation du concept des droits de l’Homme dans le champ politique et intellectuel est très récente en Algérie. Elle date du milieu des années 1980. L’Algérie est même le dernier des trois pays du Maghreb (avec la Tunisie et le Maroc) où s’est affirmé de façon un peu insolite et pour la première fois en 1985, le concept des droits de l’Homme. En Tunisie, la Ligue tunisienne des droits de l’Homme existait de façon légale depuis 1976, et l’AMDH au Maroc depuis 1979. Cela ne signifie nullement que les mécanismes des droits de l’Homme ont trouvé respect chez ces deux voisins puisque des détenus politiques et des exilés sont recensés en nombre dans ces deux pays. Le concept des droits de l’Homme a durant longtemps été absent de l’arsenal des instruments de lutte des militants algériens. Aussi loin que je remonte dans ma mémoire d’étudiant, je ne garde de souvenir de l’utilisation de ce concept dans les débats politiques. Ni dans les débats ni dans les lectures d’articles ou réflexions, je ne garde de souvenir quelconque du concept des droits de l’Homme. Le livre de R. Redjala, publié en Algérie, consacré à l’histoire de l’opposition algérienne : Opposition algérienne, très documenté, ne mentionne aucun fait ou lien historique de l’opposition algérienne à ce concept. J’ai, pour la première fois, lu et entendu parler du concept des droits de l’Homme quand j’ai eu entre les mains d’abord le document avant-projet de plateforme politique du Front des forces socialiste (1979) intitulé : Pour une alternative démocratique révolutionnaire à la catastrophe nationale, et la thèse de doctorat de H. Aït Ahmed (éditée sous le titre L’Afro-fascisme), soutenue à la fin des années soixante-dix en France). Après avoir feuilleté et parcouru pendant une bonne demi-heure le document, j’avoue que pour le jeune étudiant de sciences exactes que j’étais, le concept incarné me dépassait largement. Je garde encore un autre souvenir qui date de la période immédiatement postérieure à avril 1980. Une enseignante universitaire, militante du FFS, a fait usage de ce concept dans son intervention en assemblée générale de l’Université de Tizi- Ouzou. Je me rappelle vaguement du contenu de l’intervention ; bien qu’elle faisait un lien entre droits culturels et droits de l’Homme, elle n’a suscité aucune attention particulière parmi les étudiants présents. Je peux dire pour ma part que le concept des droits de l’Homme est largement méconnu déjà même dans les milieux étudiants et universitaires algériens. Cependant, les choses évolueront très vite et ne resteront pas à ce stade. L’hiver 1983 à Tizi-Ouzou, je me trouvais par pur hasard dans une rencontre où Hend Sadi rendait compte d’une réunion de la FIDH, à laquelle il avait pris part à Paris avec un autre camarade. C’était une participation informelle. Il avait sur lui de la documentation de la FIDH et informait Saïd Sadi que celle-ci était disposée à travailler avec un groupe qui se formaliserait éventuellement autour des droits de l’Homme en Algérie. Plus tard, j’ai appris que Me Ali Mecili et Me Beauvillard avaient joué un rôle important d’information et d’impulsion au niveau international. Voilà grossièrement le peu de souvenirs que je garde des conditions dans lesquelles s’est réalisée l’initiative pionnière de formalisation d’un mouvement autour des droits de l’Homme en Algérie. La suite nous la connaissons. Si, à la fois, les milieux de l’opposition et les élites algériennes autonomes sont restés éloignés du concept des droits de l’Homme, le pouvoir et ses élites l’étaient tout autant, sinon plus. Il entretenait une propagande par l’amalgame opposant le concept de droit des peuples avec celui des droits de l’Homme pour réfuter l’universalité de ces derniers, présentés comme la chose de l’Occident. Il est certain que la philosophie des droits de l’Homme ne pouvait cadrer avec la culture du pouvoir et de ses élites. Dans un régime de dictature, le champ des droits de l’Homme est par excellence le terrain de prédilection au conflit, voire à l’affrontement avec les tenants du pouvoir d’Etat pour toute force qui s’y aventurerait. Cette règle de conduite va d’ailleurs se confirmer très rapidement. Pour les militants actifs de l’opposition, le champ des droits de l’Homme était un espace de luttes à conquérir. Pour le pouvoir, c’étaient des brèches ouvertes par ses adversaires et dangereuses pour sa survie. La virulence des propos des dirigeants de l’époque et la célérité de la répression qui s’en est suivie donnaient la mesure de l’empoignade qui allait s’engager. En effet, il y avait matière à crainte pour le pouvoir algérien quand on connaît son ardoise éloquente en matière d’injustice, de répression et d’assassinats politiques. La résonance internationale et les échos qu’a suscités la répression qui s’est abattue sur les membres de la jeune Ligue des droits de l’Homme (juin – décembre 1985) ont mis le pouvoir dans une position très délicate. Un formidable élan de solidarité internationale va se cristalliser en faveur de la ligue réprimée. Le procès qu’il leur avait intenté va tourner à la déroute. Beaucoup parmi les détenus seront élargis avant de purger leurs peines. Voilà ce que je peux dire brièvement sur les conditions et le contexte dans lesquels les droits de l’Homme ont fait leur entrée sur la scène publique en Algérie. Depuis les arrestations des membres de la jeune ligue (1985) jusqu’à leur libération en 1987, le pouvoir a tenté de parasiter le champ des droits de l’Homme par des manipulations : entraves à la liberté d’action et de mouvement des militants libérés de prison, création et officialisation de ligue alibi parallèle… A la faveur de l’ouverture de 1989, la ligue a pu enfin être reconnue sans pour autant bénéficier de conditions de fonctionnement normales. Ses positions tranchées en rupture avec les vœux des tenants du pouvoir lui valent toujours la diabolisation et la discrimination. En dépit de l’agrément qu’elle a obtenu des autorités, des entraves systématiques lui sont opposées par le pouvoir dans toutes ses activités. Le conflit entre la ligue et le pouvoir s’est davantage durci avec la crise de 1991. La ligue s’est toujours inscrite en nette opposition à la politique sécuritaire des autorités du pays. Elle est en conflit ouvert avec le pouvoir sur la question des disparitions forcées, pendant que l’Etat lui-même reconnaît l’existence de plus de 7 000 disparus. La ligue revendique la fin du système de l’impunité, avec la justice comme préalable à toute réconciliation. L’Etat propose la réconciliation par l’oubli et l’amnésie des personnes disparues. La question des disparitions forcées en Algérie constitue aujourd’hui le nœud de la crise. Il peut constituer le socle pour une éventuelle sortie de crise et de la démocratisation du pays. La force et la détermination des militants algériens des droits de l’Homme conjuguées à la volonté et au patriotisme de nouvelles autorités peuvent constituer le ciment de ce compromis nécessaire.
A. A.

Source de cet article :
http://www.lesoirdalgerie.com/articles/2010/12/14/article.php?sid=109979&cid=41

À propos de Artisan de l'ombre

Natif de Sougueur ex Trézel ,du département de Tiaret Algérie Il a suivi ses études dans la même ville et devint instit par contrainte .C’est en voyant des candides dans des classes trop exiguës que sa vocation est née en se vouant pleinement à cette noble fonction corps et âme . Très reconnaissant à ceux qui ont contribué à son épanouissement et qui ne cessera jamais de remémorer :ses parents ,Chikhaoui Fatima Zohra Belasgaa Lakhdar,Benmokhtar Aomar ,Ait Said Yahia ,Ait Mouloud Mouloud ,Ait Rached Larbi ,Mokhtari Aoued Bouasba Djilali … Créa blog sur blog afin de s’échapper à un monde qui désormais ne lui appartient pas où il ne se retrouve guère . Il retrouva vite sa passion dans son monde en miniature apportant tout son savoir pour en faire profiter ses prochains. Tenace ,il continuera à honorer ses amis ,sa ville et toutes les personnes qui ont agi positivement sur lui

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