Culture : RENCONTRE LITTÉRAIRE
Rachid Boudjedra à Skikda
Qu’il préfère Taha Hussein à Naguib Mahfoud, qu’il s’exprime en arabe ou en français ou qu’il privilégie l’art et la forme littéraires au contenu du texte, et qu’il est le «dévoilant» par excellence du tabou sexuel, ou qu’il développe une phobie des cimetières qui l’a même empêché d’assister à l’enterrement de sa propre mère, Rachid Boudjedra est toujours présenté comme l’un des plus grands écrivains algériens.
Celui qui a suscité avec l’Egyptien Taha Hussein, selon Ali Tlilani, écrivain et modérateur de la séance, les plus âpres polémiques dans le monde littéraire arabe. Venu présenter sa dernière publication Les figuiers de Barbarie, mardi, lors de «Entretien avec le connaisseur», «Likaa el-arif», au Palais de la culture et des arts, dans le cadre de l’exposition des arts plastiques de Mohamed Skandar, il a eu, comme à chaque fois qu’il se déplace à Skikda, en face de sa littérature d’envergure mondiale, un maigre public. Le préalable médiatique n’a pas eu lieu. Lors de son allocution d’ouverture, il a été charmé par le fait que dans l’assistance, on comptait des élus politiques, notamment ceux de l’Assemblée populaire communale. Abordant son dernier livre, qui marque son retour à la langue de Molière comme moyen d’expression, il insiste sur le fait que la trame présentée soit intégralement véridique. Les figuiers de Barbarie parle de la génération encore vivante de la Révolution algérienne. Celle qui l’a vécue, subie ou ayant été partie-prenante à son épanouissement. Des doutes qui les taraudent. De cette «sélectivité philosophique », dont il garde un si précieux souvenir du temps où il enseignait alternativement la philosophie et les mathématiques au lycée, qui en donne l’assise. Le deuxième aspect du livre est une reconnaissance, qui fait fi des divergences idéologiques et religieuses. Rachid Boudjedra rend hommage, selon ses dires, aux amis juifs et chrétiens qui ont combattu aux côtés des Algériens musulmans. A une question sur le pourquoi de l’alternance entre expression linguistique arabe et française, l’auteur de La Répudiation le justifie pour des considérations politiques. Il a écrit dans la langue de Voltaire pour fuir la chape de plomb des années 1970, période considérée, selon Boudjedra, comme le firmament du contrôle politique, culturel et sexuel. Ce qui n’est plus le cas actuellement, où une certaine tolérance est constatée dans les mœurs politiques quand il s’agit d’aborder des thèmes divers, notamment celui sexuel. Au sujet de ce dernier, l’auteur explique ce penchant pour diverses raisons. Parmi elles, le fait que le sexe soit abondant dans la vie, il a été même traité, selon ses dires, par le Coran. «Nous évoluons dans une société hypocrite», dira-t-il. «Actuellement, le sexe n’est plus un tabou, puisque tout le monde en parle, notamment les jeunes, à travers l’internet et ses réseaux sociaux. Pour ma part, je suis devenu un peu vieux pour encore en parler», conclut-il.
Zaid Zoheir
Source de cet article :
http://www.lesoirdalgerie.com/articles/2010/11/29/article.php?sid=109277&cid=16
7 décembre 2010
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