Edition du Jeudi 10 Février 2005
La nouvelle de Adila Katia
La déchirure
RESUME : Salim est rentré tard. Il n’arrive pas à se décider. Mais les menaces qui risquent de peser sur sa famille, s’il lui arrivait de se retirer, finissent par l’infléchir. Sa mère et Farida ont remarqué qu’il n’est pas bien, mais pour les rassurer, il jure du contraire…
-Je n’ai pas le choix… Les menaces de son patron résonnent encore en lui. Tout en lui remettant un paquet qu’il devra apporter à Mahfoudh, il lui dit avoir pris la bonne décision.
- Ainsi, tu ne vivras pas dans le remords et le regret…
Salim ne lui a rien répondu et démarre en trombe. Ce n’est pas de gaieté de cœur qu’il va accomplir sa mission. Tout en roulant vers Marseille, il se demande ce que peut contenir le paquet. Il est grand et il a dû le mettre dans la malle secrète. Il ne cède pas à la tentation de l’ouvrir. Il s’imagine sans peine que c’est de la drogue.
Il espère que les douaniers ne le découvriront pas. Il ne veut surtout pas se faire prendre. Une fois à Alger, il tentera de parler avec Mahfoudh. Il l’écoutera certainement. Il ne peut pas lui refuser de se retirer du trafic. Il lui jurera de ne rien dire de ce qu’il avait fait ou des activités du groupe. Avec un peu de chance, il ne lui fera pas d’histoires et le laissera partir. Salim, qui regrette au plus haut point son implication dans les activités du groupe, ne supportera pas de voir sa famille souffrir.
Il est vraiment soucieux et il ne s’en rend pas compte, mais il accélère souvent. Il a dépassé la limite de vitesse de beaucoup et deux motards sont à ses trousses. Perdu dans ses sombres pensées, à tenter de trouver une solution à ce problème, il ne les remarque pas dans son rétroviseur.
Ces derniers doivent le dépasser et lui faire signe de s’arrêter. Salim s’efforce de garder son calme et de paraître détendu quand il baisse la vitre. Il les salue.
- Vous rouliez trop vite sur cette route, lui reproche un des motards. La vitesse est limitée à quatre-vingts… Le radar a indiqué que vous rouliez à plus de cent vingt…
- Je m’excuse, je n’avais pas remarqué, répond Salim. Je vais avoir droit à une contravention pour excès de vitesse ?
- Cela vous arrive souvent ?
- C’est la première fois… Cela doit être dû au fait que j’étais pressé d’arriver au port de Marseille, dit Salim. Je dois embarquer dans deux heures.
- Ce n’est pas une raison pour mettre votre vie et celles des autres en danger, rétorque le motard. Vos papiers et votre permis, lui demande-t-il.
Salim les lui remet. Il remarque que l’autre motard faisait le tour de la voiture.
- Est-ce que vous avez des bagages ?
- Non…
- Ouvrez la malle, lui demande-t-il.
Salim descend pour l’ouvrir et le regarde inspecter l’intérieur de la malle. Il n’y trouve aucune anomalie. Le motard la ferme et lorsqu’il est contacté par radio, Salim voit son regard devenir perçant.
- Où l’avez-vous achetée ?
- Je l’ai eu dans le garage où je travaille, répond-il. Son propriétaire l’a vendue, parce que refaire tout le moteur lui aurait coûté trop cher.
- Je ne crois pas, répond le motard. Il est d’un avis différent. Il a porté plainte pour vol, depuis plusieurs mois.
- Il doit y avoir une erreur, dit Salim en se sentant devenir pâle. Je l’ai achetée, pas volée. Non.
- Je veux bien vous croire, mais elle ressemble à l’une des voitures volées à Bordeaux, insiste le motard avant de lui remettre ses papiers. Vous êtes en règle, puisque c’est la première fois que vous faites de la vitesse, vous n’aurez pas de contravention. Soyez prudent en route !
Salim le remercie avant de reprendre le volant. Il roulera en respectant la vitesse indiquée sur les panneaux. Il a eu très chaud. Pendant un moment, il a cru qu’il allait être arrêté. Une fois au port de Marseille, il n’a qu’une seule envie : être dans le bateau…
(À suivre)
A. K.
ADILAKATIA@YAHOO.FR
30 octobre 2010
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