Edition du Mercredi 09 Février 2005
La nouvelle de Adila Katia
La déchirure
RÉSUMÉ : Farida se demande ce qui peut bien rendre son mari aussi soucieux. Une fois rentré à la maison, Salim s’en va voir Aïssa pour l’informer de sa décision. Mais ce dernier l’avertit. En se retirant des affaires, il mettait sa vie et celle de sa famille en danger…
Salim a sa tête des mauvais jours lorsqu’il rentre quelques heures plus tard. Il est resté dehors pour réfléchir. Les menaces de Aïssa résonnent encore dans sa tête. Aïssa ne plaisantait pas. Qu’il s’en prenne à lui, il peut le comprendre et même l’accepter. Mais qu’il menace sa famille, il ne le supporte pas.
Cependant, il réalise que s’il cède, il ne pourra jamais se retirer et avoir une vie tranquille. Il prend la décision de ne pas céder.
Ce n’est pas le moment de flancher.
Il a sa mère et sa femme qui l’attendent et qui espèrent finir leur vie avec lui. S’il continue de travailler dans le trafic, il se fera prendre un jour ou l’autre, et il imagine la déception de sa mère et de Farida, et les joies de ses frères et ses sœurs…
Ce nouvel échec leur permettra de rappeler à leur mère qu’il n’a pas changé.
- Mais où étais-tu ? Cela fait des heures que tu es parti et ton patron a appelé plusieurs fois.
- Qu’est-ce qu’il voulait ?
- Il te demande d’être au garage, lui dit sa mère. Il voudrait que tu passes prendre la voiture. Tu ne nous as pas dit que tu allais à Alger !
- Il doit y avoir une erreur, rétorque Salim. Je ne pars nulle part.
Il va s’enfermer au salon et appelle le garage. Aïssa prend tout son temps pour décrocher.
- Qu’est-ce qui te prend ? Tu veux vraiment jouer avec la vie de ta mère et de ta femme ? Tu ne voudrais pas qu’il leur arrive un fâcheux accident ? l’interroge Aïssa. Tu sais que certains accidents tuent en général mais, par miracle, certains échappent à la mort et se retrouvent avec des séquelles qui les handicapent à vie. Y as-tu seulement pensé ?
Salim répond par des insultes et jure qu’il aurait affaire à lui si l’un des membres de sa famille avait un accident.
- Quoi que tu fasses, tu n’as pas le choix. Soit tu te plies aux conditions de travail, soit ta famille paye le prix de tes erreurs, poursuit Aïssa. Rends-toi à l’évidence. Ta vie sera plus simple si tu pars demain matin.
- Je veux en finir. Je ne veux plus…
- Tu aurais dû y penser avant de t’engager, dit son patron. Tu ne peux plus faire marche arrière. Quand le comprendras-tu ? Je te jure que si tu ne te rends pas serviable, tu le regretteras amèrement. Ce n’est pas facile de vivre avec sa famille après que celle-ci eut le malheur de faire un accident, répète-t-il. Tu devrais penser à ça, avant de te décider une bonne fois pour toutes. Prends la bonne. Ne trahis pas les tiens.
Lorsque Salim raccroche et sort du salon, il tombe sur sa mère. Fatima est très inquiète. Mais elle ne lui pose pas de questions.
- Le dîner est prêt. Si tu veux, on passe à table maintenant, propose-t-elle.
- Dîner sans moi, répond-il. Je n’ai pas faim.
- Tiens-nous alors compagnie, dit Farida. On ne t’a pas vu depuis des heures et des heures. Tu nous as manqué.
- Hélas, je ne suis pas d’agréable compagnie, soupire-t-il. Vous saurez vous passer de moi, ce soir et les jours prochains, ajoute-t-il. J’ai un voyage à faire.
- Cela ne te réjouit pas, remarque sa mère. Aurais-tu des soucis que tu nous cacherais par hasard ?
Salim secoue la tête en s’efforçant de sourire. Pour la rassurer…
- Non, non, tout va bien. Je te le jure.
(À suivre)
A. K.
ADILAKATIA@yahoo.fr
30 octobre 2010
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