Edition du Dimanche 28 Août 2005
La nouvelle de Adila Katia
Les retrouvailles
RÉSUMÉ : Nadia est consciente de sa chance. Même si son mari n’a donné aucun signe de vie, elle s’en sort bien. Les enfants ont fini leur scolarité et sont partis en vacances. Hamida parle d’un prétendant. Mohand approuve, mais Nadia n’est pas du même avis…
Hamida poursuit la discussion et insiste sur le fait qu’il est important pour elle de refaire sa vie. Nadia se sent prise au piège de sa belle-sœur. Son frère est séduit par l’idée. Le fait que le prétendant soit un de ses employés modèle le rassure. C’est un bon parti. D’ailleurs, Hamida n’a pas besoin d’insister. Mohand poursuit à sa place.
-Tewfik est quelqu’un de bien, insiste-t-il. Vraiment…
-Vous semblez oublier que je suis toujours mariée, répond-elle au risque de se quereller avec son frère. Et j’ai trois enfants à ma charge !
Mohand s’engage à les garder.
-Je serai le père qu’ils n’ont plus, lui dit-il. Ils seront comme mes enfants. Je te le jure.
-Je sais que tu tiens parole, murmure Nadia. Mais je ne peux pas me remarier. Et puis, cet homme ne t’a rien dit. On est en train de parler de choses qui n’auront jamais lieu.
-Je peux te jurer que s’il vient demander ta main, tu te remarieras !
-Je ne veux pas me séparer de mes enfants. Ma vie est avec eux, insiste Nadia, en pleurant. Comment peux-tu me parler de mariage et de refaire ma vie alors qu’elle est auprès d’eux ? Et puis, je ne suis pas libre. Je ne suis ni divorcée ni veuve.
-Pour le divorce, je vais charger mon avocat.
-Je n’ai aucune envie de divorcer. Mon mari se cache quelque part, dit Nadia. Un jour, il reviendra.
-Je me demande comment tu peux encore espérer son retour, rétorque Mohand. Après l’acte criminel qu’il a commis, tu ne le reverras jamais !
Mohand n’a jamais porté son beau-frère dans son cœur. Orphelins très jeunes, c’est leur oncle paternel qui les avait recueillis. Mohand n’a pas pu étudier longtemps, faute de moyens. Il a quitté le village et a tenté sa chance loin des siens. Il a travaillé dur avant d’en arriver là où il est.
Quand il est retourné au village, plusieurs années avaient passé. Son oncle était mort et Nadia avait été mariée à un maçon. Il lui a semblé, alors, que Rahim comptait sur lui pour se la couler douce. Nadia venait avec sa famille et restait chez lui pendant des semaines, y compris Rahim, alors qu’il aurait pu travailler.
Alors, Mohand a demandé à sa sœur de venir uniquement avec ses enfants. Elle pouvait compter sur lui, pour les aider de temps à autre. Quant à Rahim, il ne voulait pas de lui, chez lui.
Maintenant qu’il n’est plus avec sa famille, Mohand juge qu’il est vraiment temps pour sa sœur d’avoir une vraie vie tranquille.
-Meurtrier ou voleur, il reste mon mari, murmure-t-elle. Ma vie est déjà faite et je ne fuirais pas mon destin.
Elle voit bien que son frère est en colère et qu’il lui en voudra à mort de ne pas lui obéir. En son fort intérieur, elle sent que cela va mal finir. D’ailleurs, Mohand ne veut plus en discuter. Le front plissé, il la prévient :
- S’il fait sa demande officiellement, sache que j’accorderai ta main. Si tu t’obstines à refuser, je risque de piquer une colère terrible.
Nadia ne dit rien. Elle ne tarde pas à retourner chez elle. Ses enfants sont en train de regarder la télévision sur la terrasse. Elle ne veut pas être séparée d’eux. Ils sont sa seule raison de vivre. Comment pourrait-elle refaire sa vie, sans eux et être heureuse ? Les biens matériels ne peuvent pas remplacer le vide de son cœur si elle les laisse derrière elle.
(À suivre)
A. K.
Adilakatia@yahoo.fr
17 octobre 2010
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