Edition du Dimanche 21 Août 2005
La nouvelle de Adila Katia
Les retrouvailles
RÉSUMÉ : Rahim est sans travail depuis des mois.
Il a la chance d’avoir Nadia, une femme belle et travailleuse. Les villageois rêvent de l’approcher. Elle les ignore. Si bien qu’eux aussi refusent d’engager son mari comme maçon, les laissant se débattre dans la misère en espérant qu’elle demandera de l’aide, un jour…
Nadia et Rahim ont trois enfants. Les deux garçons Farid et Tarek sont âgés de douze et dix ans. Tout comme Lynda, leur cadette, ils vont à l’école. Sans la générosité de leur oncle Mohand, ils n’auraient jamais pu la fréquenter. Leurs excellents résultats font que leurs parents sont fiers d’eux. Malgré leur âge, ils sont conscients de bien des choses . Quand ils n’ont pas école, Farid aide deux garçons de sa classe à réviser. En retour, les parents de ces derniers lui offrent des vêtements. Quant à Tarek, il garde les moutons et les brebis d’une veuve du village. Chaque soir, il rapporte du lait frais et chaque année, elle leur donnait un mouton. En les vendant à bon prix, ils ont pu s’acheter un petit frigo et un téléviseur. Tarek s’est acheté une flûte et quand il garde le troupeau de moutons, du matin au soir, durant les vacances, il en joue durant des heures. Les douces mélodies étaient emportées par le vent. Ils étaient nombreux à l’écouter et à apprécier son jeu.
Dès que l’enfant remarquait leur présence, il cessait de jouer. Parfois, il s’arrêtait parce qu’il entendait des cris. Il y avait toujours une bagarre entre des garçons ou une querelle entre les femmes d’un même foyer. En général, les belles-mères crient plus fort que leurs brus. Ce jour-là, Tarek a entendu l’épicier du village, ammi Rabah crier. Son père Rahim y a un crédit. Le peu de denrées alimentaires qu’il ramenait à la maison, il ne les paie pas. Il promettait à l’épicier de payer la facture dès qu’il aura du travail. Ammi Rabah attend maintenant depuis trois mois de voir son argent mais Rahim est toujours sans travail. Le crédit est tellement élevé qu’il a honte de passer devant l’épicier sans pouvoir le régler. Il l’évite mais, chose connue de tous au village, ammi Rabah est insupportable quand on ne le paie pas. Les cris et les engueulades ne sont rien quand il se met en colère. Il peut même devenir méprisant et méchant.
Tarek devine qu’il s’en est pris à son père. Il abandonne le troupeau de moutons et court au village. En chemin, il croise un copain et le prie d’aller les lui garder.
- Je vais vite revenir, promet-il en continuant son chemin. Quand il arrive à la place du marché, il doit se frayer un chemin parmi les curieux venus assister à la querelle.
- Je ne te mens pas, je te jure ne pas avoir un sou à la maison… Demain, je pars chercher du travail.
- Peut-être même que tu ne reviendras pas. Tout cela pour que tu ne règles pas la facture, crie l’épicier. Je veux mon argent et tout de suite !
- Dès que j’en aurais, promet-il. Je ne suis pas un menteur et pas plus qu’un autre, je ne voudrais avoir de dettes… Allah ghaleb !
Deux vieux interviennent et tentent de calmer l’épicier, lui rappelant que cela peut arriver à n’importe qui d’être au chômage et d’avoir une dette.
Ammi Rabah se calme, ne voulant pas se quereller avec eux car ils sont des clients réguliers.
- S’il n’a pas d’argent, sa femme a certainement des bijoux, remarque-t-il. Il pourrait les mettre en gage, ou … J’ai une meilleure idée…
Les villageois se tournent vers l’épicier qui est tout sourire. Son idée le ravit. Il est heureux.
- Dis toujours ! lui crie l’un d’eux.
- Sa femme… Je pourrais la prendre… Elle vaut bien tous les bijoux du monde, ajoute-t-il. Je te jure de la rendre heureuse. Elle aura tout ce qu’elle veut.
Les regards se sont braqués vers Rahim qui a changé de couleur. Ses yeux lancent des éclairs et il a le visage mauvais. Ammi Rabah a dépassé les limites. Il ne voit pas le couteau que Rachid vient de sortir. Personne ne l’a vu à part le petit Tarek…
(À suivre)
A. K.
Adilakatia@yahoo.fr
17 octobre 2010
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