Edition du Jeudi 08 Décembre 2005
Culture
À plusieurs reprises, ces derniers mois, nous avons été sollicités par des journalistes, des photographes, des cinéastes, des peintres, désireux d’éditer des “guides d’Alger” et de fixer la ville sur papier ou sur pellicule.
Nos discussions nous ont permis de développer quelques idées et, ainsi, d’affiner, de préciser notre opinion sur la question suivante : avec quel regard doit-on aller à la rencontre de notre ville ? Notre point de vue est qu’il ne faut pas aborder Alger à partir de la mer, comme l’ont fait ses multiples envahisseurs, mais au contraire arriver par l’intérieur des terres, comme le font les enfants de ce pays. Il faut, en effet, descendre vers la grande bleue. C’est moins fatigant et cela laisse surtout le temps de mieux découvrir la ville et de l’apprécier. Tous les chemins empruntés alors nous font traverser des quartiers tous aussi beaux et différents les uns que les autres. En partant d’Hydra ou de Ben Aknoun, de Bouzaréah ou de Notre Dame d’Afrique, nos pas nous mènent à travers vergers et routes ombragées, de tournant en tournant, de palier en palier, de marché en marché, vers le centre-ville, le cœur palpitant de la capitale. On peut aussi aborder la ville par les boulevards parallèles à la mer, en venant soit de Belcourt, soit de Raïs Hamidou, mais le regard ici ne sera pas aussi intime. L’essentiel pour le photographe, car c’est lui qui nous intéresse le plus, est de saisir dans ses nombreux itinéraires, l’urbanisme particulier de cette ville, construite en amphithéâtre. Les nombreuses perspectives qui s’offrent à lui, les architectures anciennes ou nouvelles qui la caractérisent, les rues, ruelles et placettes ainsi que les escaliers qui se resserrent de plus en plus dessinent un véritable damier. Enfin, c’est l’arrivée sur le magnifique front de mer à partir duquel il pourra remonter par les venelles de la Casbah, jusqu’à la Citadelle. Et, de là, continuer jusqu’à Sidi Abderrahmane et redescendre ensuite pour traverser les marchés mythiques qu’elle abrite. Lorsque notre photographe aura sillonné la ville durant plusieurs jours, lorsqu’il aura compris sa topographie, lorsqu’il aura senti les odeurs propres à chacun des ses quartiers (et détourné son regard des sachets noirs inopportuns !), il lui restera alors à fixer sur sa pellicule l’essentiel, c’est-à-dire ses habitants, ses hommes, ses femmes si belles, et surtout ses enfants débrouillards et chahuteurs qui l’habitent et la font vivre, qui l’animent et parfois la détruisent, de trop l’aimer, sans doute. Et si par bonheur les visages ressemblent aux maisons, notre photographe aura atteint son but. Alors, une exposition de ses photos pourra traduire l’âme de notre belle cité. Après cette promenade, nous dirons notre espoir de voir ces “guides”, ces expositions, ces documentaires en gestation rendre à Alger sa dimension cosmopolite. Ainsi, l’autre, l’étranger ami, y trouvera sa place et apprendra, lui aussi, à l’aimer.
B. K.
PS : rendez-vous le 22/12/05 à 16h, Filmathèque Zinet (Oref).
boudjema.kareche@hotmail.com
15 octobre 2010
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