Le Carrefour D’algérie
Beaucoup a été dit et écrit sur les événements tragiques d’octobre 1988. Certains y voyaient un «chahut de gamins» qu’il fallait ignorer et ne lui accorder aucune importance, d’autres accusaient déjà à l’époque une main qui manipulait les jeunes algériens de derrière les rideaux et d’autres encore scandaient sur les toits une révolution
populaire qui allait complètement décimer le régime. Pourtant, le 05 octobre qui continue aujourd’hui encore à déchaîner les passions, peut-être même rallumer la nostalgie de l’ère de la pensée unique, ne devait être limité à une simple manipulation politique, ni à un égarement d’une jeunesse que l’on voudrait à tout prix qualifier de capricieuse. Le 05 octobre est d’abord une leçon. Une belle leçon sur ce qu’un pouvoir autoritaire peut provoquer comme colère, frustration et réaction violente. Une leçon exemplaire sur les conséquences d’un système qui croyait à l’époque avoir réussi à endormir le peuple grâce à une pensée unique et un parti unique. Une leçon enfin pour un pouvoir complètement obsolète qui n’a pas senti le vent violent de la liberté balayer le monde entier. Le soulèvement populaire, ou pour être plus honnête, de la jeunesse, n’était en fait qu’une suite logique à de graves dépassements commis par le pouvoir lui-même sur un peuple qui jusque-là a préféré souffrir en silence. Non, le 05 octobre n’était pas une opération de manipulation ni l’oeuvre de la «main étrangère» encore moins une tentative de déstabilisation des «forces occultes». Certes, certains partis qui activaient dans la clandestinité ont sauté sur cette occasion en «or» pour en récupérer tous les fruits mais c’était d’abord l’oeuvre d’une jeunesse désabusée, déboussolée et très frustrée. Aujourd’hui encore, beaucoup refusent cette lecture émanant pourtant d’hommes et de femmes acteurs de ce soulèvement et témoins oculaires des événements car jeunes en ce fameux octobre et donc profondément concernés. Ils préfèrent la thèse de la manipulation et de la politisation, plus frappante et «digeste» aux yeux du monde. Sinon pourquoi ces partis ou ces hommes politiques si forts et si convaincants courent toujours dans tous les sens sans réussir à en convaincre leurs propres militants maintenant qu’ils activent en toute légalité? Pourquoi, ils continuent à occuper les espaces de l’opposition alors qu’ils avaient tout pour se placer au pouvoir après ce soulèvement? Non, le 05 octobre n’a pas obéi aux règles du jeu qui auraient pu marcher ailleurs, les jeunes d’octobre 88, et c’est une chance peut-être, avaient depuis longtemps coupé tous les ponts avec la chose politique. Le soulèvement leur appartient et aucun parti, aucun clan, aucun homme n’a le droit aujourd’hui de le leur subtiliser au nom d’on ne sait quel objectif. Alors de grâce, épargnez ce patrimoine sacré des jeunes. C’est leur propriété.
6 octobre 2010
Contributions