Le Carrefour D’algérie
Mardi 5 Octobre 2010
Où peut-on retrouver, en Algérie, une version moderne et gratuite des «Mille et une nuits»? Dans le Hammam? Le Salon de coiffure? Possible. Sauf que depuis plus d’une décennie, il existe un autre espace où l’on peut écouter, sans interruption, des histoires sans queue ni tête,
des disputes en live, des histoires d’amour, de divorce, d’héritage, de dettes et d’argent, des histoires secrètes et des histoires de voisinage. C’est un endroit où les femmes parlent parfois à voix haute, sans risquer la Fatwa ni le regard des hommes. Un espace curieux où les femmes se sentent chez elles, seules, dans l’intimité et où elles se laissent aller à l’exercice d’un droit à la parole qu’on ne retrouve même pas au Parlement par exemple. Il suffit de prendre chaise dans un taxiphone, chez un ami, pour entendre des vies entières se dérouler en quelques minutes, deviner des amours ou des drames, regarder des vieilles gémir et de jeunes filles supplier ou se mettre en colère, assister à des préparatifs de mariages ou de divorce, des réconciliations ou des organisations de rendez-vous clandestins. Le taxiphone peut vous fournir de meilleurs feuilletons que les égyptiens ou les turcs et peut installer le décor du meilleur film algérien depuis les vacances de l’inspecteur Tahar. Des vies s’y racontent et dans une sorte de liberté de ton et de décibels qui prouvent que les femmes algériennes doivent beaucoup plus, pour leur liberté au téléphone, qu’aux partis démocrates, les mouvements féministes ou les quatre Constitutions de l’Algérie.
5 octobre 2010
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