Edition du Mardi 05 Octobre 2010
Chronique
Pour son cinquième anniversaire, le superviseur judiciaire de l’application de la Charte nationale nous a fait les comptes de la réconciliation nationale.
Selon Azzi, la démarche aurait ramené quelque sept mille cinq cents terroristes dans “le droit chemin” durant les cinq ans de sa mise en œuvre.
Si l’on suit les chiffres du superviseur judiciaire de la charte, celle-ci accueille environ trente “repentis” par semaine, soit plus de quatre par jour. Même si on compte les 2 600 prisonniers unilatéralement élargis par le pouvoir, et sans qu’ils n’aient rien demandé ni concédé, il resterait quelque cinq mille “vrais repentis”, soit mille par an, soit près de trois redditions quotidiennes !
D’abord, il faut que le recrutement suive, pour que le maquis puisse nous restituer ses occupants avec un tel débit. Heureusement que beaucoup de jeunes préfèrent la harga au terrorisme et qu’Al-Qaïda ne recrute pas autant.
Ensuite, si les terroristes se bousculaient au portillon du
repentir, le pouvoir, qui fait de la promotion du leurre réconciliateur son unique et constant programme, en aurait certainement profité pour nous rappeler chaque jour le succès quotidien de sa politique. On le voit : la moindre reddition a son prolongement médiatique retentissant.
Si à la moindre déclaration, les rares repentis — au sens large, parce qu’ils n’en pas vraiment — occupent la une des journaux, c’est qu’il n’y en a pas des tonnes. Si la reddition s’était à ce point banalisée, on n’assisterait pas à cette “peopolisation” du soi-disant processus de réconciliation qui fait d’anciens chefs terroristes des stars.
Le nombre, énorme, de “repentis” contraste avec l’autre chiffre évoqué par Azzi : seulement 1 290 terroristes tués pour 7 540 repentis ! En d’autres termes, on doit bien plus à la réconciliation nationale qu’à la lutte antiterroriste. La clarté du message politique est aveuglante : on gagnerait à adopter l’attitude passive qui consiste à leur ouvrir les bras et à attendre que les terroristes se rendent plutôt que de les pourchasser.
Le nombre de terroristes abattus est peut-être proche de la réalité, mais si l’on excepte ceux qui ont bénéficié, au sens littéral, de la mesure d’élargissement, les repentis ne courent pas encore les rues. Au demeurant, ces chiffres n’ont pas de sens sans évaluation des troupes dont dispose Al-Qaïda. Et les données exprimées jusqu’ici, par l’ancien ministre de l’Intérieur, notamment, se sont avérées trop contradictoires pour s’approcher de la réalité. Il est surtout regrettable que ne soit pas remémoré le chiffre des victimes, toujours dissimulé comme autant de manifestations honteuses qui discréditent la politique de réconciliation.
Il est, d’un autre côté, inopportun de chercher à suggérer à coups d’arguments quantitatifs la pertinence d’une démarche qui, depuis cinq ans, piétine et dont l’échec s’accompagne de son cortège de victimes. Coup sur coup, de Zemmouri à Ammal en passant par Zekri, des hommes tombent en essayant de contenir le terrorisme pendant qu’on tente de commémorer la réconciliation, décidément interminable, de l’assassin et de la victime.
M. H.
musthammouche@yahoo.fr
5 octobre 2010
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