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KIOSQUE ARABE La longue nuit sans étoiles Par Ahmed Halli

27 septembre 2010

Contributions

KIOSQUE ARABE
La longue nuit sans étoiles
Par Ahmed Halli
halliahmed@hotmail.com

«C’est une étoile qui s’éteint, et combien sont rares les étoiles dans la longue nuit arabe.» C’est par de telles expressions, entre autres, que peuvent se résumer les réactions arabes à la disparition de Mohamed Arkoun. En attendant que les Algériens lisent, ou relisent Arkoun, et décryptent son œuvre avec la lucidité qu’elle requiert, ce sont des lecteurs du Machrek qui nous montrent la voie.


C’est d’abord l’Institut du monde arabe (IMA) à Paris qui rend hommage au penseur algérien mercredi prochain, 6 octobre à 18 h 30. Cette institution n’est peut-être pas gérée de la meilleure manière qui soit, mais elle échappe encore à certaines influences pernicieuses, venues d’ailleurs. Je me comprends. En attendant, la presse du Moyen-Orient traite du décès de Mohamed Arkoun comme d’une perte irremplaçable. Le journal électronique Elapha ouvert un dossier spécial consacré au grand penseur algérien, étranger en son pays. Si certains intellectuels arabes critiquent, sans véhémence, les positions laïques de Mohamed Arkoun, tous s’accordent, par contre, pour reconnaître la valeur et la pertinence de ses analyses. Pour le libéral jordanien Chaker Naboulci, Arkoun est le chercheur qui a permis de redécouvrir l’Islam. «Il a dépoussiéré, dit-il, les idées reçues et les connaissances imposées sur cette religion, qu’il a débarrassée du poids des pesanteurs acquises au fil des siècles. Cependant, note Naboulci, le disparu éprouvait un sentiment d’échec, parce que ses livres et ses idées n’étaient pas connus dans les milieux populaires arabes. Pour l’écrasante majorité des peuples arabes, il était un illustre inconnu, alors que les livres de fondamentalistes obscurantistes se vendaient par centaines de milliers»(1). Toutefois, souligne Chaker Naboulci, son aura et son influence n’ont cessé de grandir au sein des élites intellectuelles dans le monde arabe. Ceci, grâce à son traducteur, Hachem Salah, dont il faut saluer la contribution, au passage, puisqu’il a joué auprès de Mohamed Arkoun le rôle qui avait été celui d’Ibn-Rochd pour Aristote. L’écrivain jordanien déplore en outre le peu d’intérêt des médias, notamment les chaînes de télévision plus préoccupées d’émission people, à l’égard du chercheur algérien. Et lorsqu’une télévision satellitaire(2) l’a invité, ajoute-t-il, c’est uniquement pour le tourner en dérision face à une émeute d’intégristes. De son côté, l’écrivain palestinien, Hassan Khader, relève que pour Mohamed Arkoun, les activités politiques ne faisaient pas partie de ses préoccupations. Il se contentait d’être un universitaire, porteur de lumière et se consacrant uniquement à la réflexion. Ce qui ne l’empêchait pas de donner ses avis sur les faits politiques contemporains. «Toutefois, rappelle l’écrivain, il n’hésitait pas à donner son avis sur les grands problèmes politiques. Ainsi, au lendemain des attentats du 11 Septembre, il avait remarqué que les gouvernements occidentaux et les régimes arabes et musulmans au pouvoir s’attachaient à remettre en selle l’Islam soufi, tel que le pratiquent les zaouïas. Ceci dans le but d’opposer cet Islam populaire et pacifiste à l’Islam du mouvement Al-Qaïda. Selon Arkoun, les promoteurs de cette idée ne tenaient pas compte du fait que les socialistes arabes et turcs s’étaient révoltés contre cette conception. Ils considéraient que l’islam des confréries était source d’isolationnisme et de repli sur soi. Or, Arkoun estimait que cet islam des zaouïas, prétendument modéré, était hostile et faisait obstacle à la liberté de pensée. Il est évident que Mohamed Arkoun n’a pas été plus entendu sur ce chapitre que sur d’autres. Aujourd’hui, beaucoup de régimes arabes s’allient aux confréries ou aux fondamentalistes locaux, voire aux deux en même temps, pour se maintenir et durer. Au Maroc, où on est plus conséquent qu’ailleurs, on ne s’embarrasse pas, semble-til, de choix tactiques et/ou épisodiques. Selon, le site Al-Arabia.net, pendant électronique de la chaîne saoudienne Al-Arabia(3), le Maroc s’appuie résolument sur les confréries pour contrer l’activisme des islamistes. S’appuyant sur des témoignages et des analyses de spécialistes, le site souligne que les autorités redoublent d’efforts pour enseigner aux Marocains les rites du soufisme, par le biais de la télévision. Ainsi, les chaînes officielles s’attachent à consacrer le maximum de temps d’antenne et de reportages aux festivités et séances rituelles des zaouïas. Ces dernières jouissent des largesses de la monarchie qui leur distribue dons matériels et enveloppes financières. Le régime marocain a d’abord instrumentalisé les islamistes pour faire rempart à la progression de la gauche. Ensuite, il a utilisé les fondamentalistes pour contrer l’avancée des mouvements islamistes, dits modérés, mais politiquement dangereux pour le pouvoir. Aujourd’hui, ils recourent systématiquement aux zaouïas pour conserver l’initiative et empêcher la propagation du wahhabisme dans le pays, selon un des analystes interrogés. «Les États-Unis, en plus de la confrontation militaire, ont mis en place une riposte religieuse contre Al-Qaïda, l’islam des confréries en l’occurrence, et la quasi-totalité des États arabes appliquent cette doctrine », affirme l’un d’eux. Sans compter qu’en toile de fond de cet engouement officiel envers les zaouïas, se profile le conflit du Sahara occidental et la lutte d’influence des deux régimes, pour le contrôle des zaouïas, ajoute-t-on. Ça ne vous rappelle rien ce retour en grâce des zaouïas, après des décennies d’anathèmes et d’accusations de collaboration avec le colonialisme ? En tout cas, l’Égyptien Moubarak a bien appris de chez nous : cet été, les confréries soufies se sont convoquées en conclave au Caire et ont appuyé la candidature de Moubarak à un nouveau mandat. Il y a aussi adhésion implicite au projet de succession héréditaire, au cas où le «Raïs» n’aurait pas l’opportunité ou la force de rester à son poste. Au Maroc, et en Égypte, ils savent apparemment où ils veulent aller, sans tâtonner, sans conclure d’alliances, voire de mésalliances. Je crois bien que nous sommes plus intelligents qu’eux : faute de rallier les fondamentalistes au soufisme des zaouïas, il suffit de convertir les zaouïas au wahhabisme, et le tour est joué.
A. H.
1) Que dire alors de la place de Mohamed Arkoun dans les bibliothèques et les librairies algériennes? Que dire d’autres œuvres d’auteurs éclairés, déclassés, au profit des auteurs d’opuscules «djihadistes» et de fatwas ridicules.
2) Il s’agit ici de la chaîne Al- Jazeera et du trémulant présentateur Fayçal Al-Kassem, l’homme qui critique tous les pays arabes, sauf la Syrie et le Qatar. Les lecteurs, tentés de mieux connaître cet animateur fou furieux, peuvent retrouver ses écrits dans le quotidien Echourouk. Il y a des alliances qui ne s’expliquent pas toujours de façon rationnelle.
3) La semaine dernière, la dissidence qu’aurait menée au sein de la chaîne son directeur en personne, Abderrahmane Al- Rached, a provoqué des remous. On a même failli parler de révolution, alors qu’il ne s’agissait que d’une saute de vent passagère. Les «dissidents » sont rentrés dans le rang, et il n’y aura pas de débat sur la place et le rôle d’un intellectuel dans une télévision d’État.

Source de cet article :
http://www.lesoirdalgerie.com/articles/2010/09/27/article.php?sid=106514&cid=8

À propos de Artisan de l'ombre

Natif de Sougueur ex Trézel ,du département de Tiaret Algérie Il a suivi ses études dans la même ville et devint instit par contrainte .C’est en voyant des candides dans des classes trop exiguës que sa vocation est née en se vouant pleinement à cette noble fonction corps et âme . Très reconnaissant à ceux qui ont contribué à son épanouissement et qui ne cessera jamais de remémorer :ses parents ,Chikhaoui Fatima Zohra Belasgaa Lakhdar,Benmokhtar Aomar ,Ait Said Yahia ,Ait Mouloud Mouloud ,Ait Rached Larbi ,Mokhtari Aoued Bouasba Djilali … Créa blog sur blog afin de s’échapper à un monde qui désormais ne lui appartient pas où il ne se retrouve guère . Il retrouva vite sa passion dans son monde en miniature apportant tout son savoir pour en faire profiter ses prochains. Tenace ,il continuera à honorer ses amis ,sa ville et toutes les personnes qui ont agi positivement sur lui

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