Edition du Dimanche 12 Septembre 2010
L’Algérie profonde
C’est pas une blague
Noir et blanc
Par : Mustapha mohammedi
Elle fait pitié cette ferme en bordure de route, comme toutes celles qu’on aperçoit ici et là, à travers la plaine. On dirait une ruine, une épave abandonnée, et pourtant des familles y ont élu domicile, travaillent et font même des enfants.
Avec un peu de rangement et quelques réfections au niveau des murs, aujourd’hui ratatinés, elle retrouverait certainement des couleurs. Bref, elle a encore de beaux restes dans la vallée, cette ferme-là, et plus que tout, elle tient encore debout. J’imagine que le colon qui l’a montée brique par brique, pour réaliser la maison de ses rêves, a dû faire suer bien des burnous.
J’imagine qu’il a mis toute la gomme, toute sa passion et le prix à payer pour sortir de terre un palais digne de lui, digne de son rang et à la hauteur de ses ambitions. Parce qu’il en avait le bougre.
Au point qu’il a baptisé son petit royaume “Maison blanche”, en hommage à la fois au général Eisenhower et à l’armée américaine qui a libéré la France. À la “Maison blanche”, une piscine était à la disposition des invités qui voulaient se rafraîchir. Ils pouvaient se prélasser à l’ombre des palmiers, plantés là, autant pour leur déco “Lawrence d’Arabie” que pour leurs dattes sauvages qui les faisaient saliver. Les dépendances étaient si bien alignées qu’on avait l’impression qu’elles attendaient la revue. Après quelque hectares domestiques qui servaient de potager à la famille, les immenses terres de l’hacienda commençaient alors à perte de vue. Ici, ce qu’on appréciait le plus c’était l’oued Mekerra qui passait sous vos pieds. Le spectacle était magnifique, féerique. Pas pour longtemps. Il tournera au cauchemar quand Bush, un colon voisin, viendra à la “Maison blanche” réclamer de l’aide après l’incendie de ses granges par les fidaïs de Sidi Bel-Abbès. C’était en 1958. Quarante ans avant qu’un certain Wallace Bush, le vrai, ne prenne ses quartiers à la “Maison blanche”, la vraie
L’histoire a de ces ironies…
12 septembre 2010
M. MOHAMMEDI