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ICI MIEUX QUE LA-BAS Ce que tu ne dis pas sera retenu contre toi !

5 septembre 2010

Contributions

ICI MIEUX QUE LA-BAS
Ce que tu ne dis pas sera retenu contre toi !
Par Arezki Metref
arezkimetref@free.fr

Je n’ai pas encore élucidé l’énigme, je me console avec cette hypothèse vulgaire: c’est peut-être parce qu’ils bossent dans un salon de coiffure que les types se coupent les cheveux en quatre ! Facile, Açil ! Mais que sont-ils en train de faire, bon sang ! Je te laisse imaginer le décor ! Figure-toi un salon de coiffure… Un salon ? Enfin, une échoppe… un couloir… un truc où on coupe les cheveux pour seulement 8 euros, gomina, séchoir, TVA et pourboires compris.

C’est presque raser gratis au nom de Dieu! C’est pas crade, du moins à proprement parler mais c’est loin de répondre aux critères de l’hygiène helvétique. Ce qui est gênant dans ce… salon de coiffure, c’est la chaleur. Étouffante. Oppressante. Presque insupportable. Que dis-je : «presque»? Non, carrément, franchement insupportable. En prime, tu as droit aux conseils avisés des voyants et des voyantes trilingues de Beur FM te parvenant à travers les grésillements d’un poste antédiluvien. Si pour le même prix tu gouttes à la canicule, c’est parce qu’il n’y a pas de climatisation ici. A ce prix-là, il ne faut pas demander la lune! L’argument a son poids. Bon, passons ! L’attraction (répulsion) du lieu, ce sont les jeunes apprentis coiffeurs. S’ils sont novices dans l’art de raccourcir le cheveu, ils possèdent en revanche celui de te faire dresser les poils sur la tête ! Ils sont trois, formatés, sortis du même moule. Qui sait même s’ils ne sont pas interchangeables ? Ils ont le cheveu rare, amalgamé par quelque gel first price, un filet de barbe calculé sur la sunna et indexé sur l’indice du zèle salafiste et une facilité à délivrer des fetwas, ou ce qui y ressemble, à te couper le souffle. Ils n’ont que vingt-cinq ans et en additionnant leurs âges respectifs, on ferait à peine un quasi-octogénaire. Eh bien, ces mômes ne parlent que de la mort, des feux de l’enfer où iraient brûler tous ceux qui ne suivraient pas la même voie qu’eux. Au besoin, ils vont jusqu’à clamer leur disponibilité à anticiper les fameux feux de l’enfer ici bas pour les cas les plus graves d’impiété dont ils ont été témoins. Comme le salon… enfin le truc de coiffure donne sur la rue, ils ont tout loisir d’observer les gens du quartier auxquels ils ont réservé une suite personnalisée en enfer. T’as vu, celui-là, lâche sévère le coiffeur debout à ma droite. Tee-shirt noir parcouru de barbelés, l’œil kholisé réglementaire, il semble être le gourou du trio. Ça se voit à quoi ? Eh bien, dès qu’il commence à causer, les autres se taisent! Au pire, ils opinent du chef. -Il est quoi, palestinien, ce kafer ? Au lieu d’aller donner sa vie à son pays, il est là à traîner dans le quartier en faisant le joli cœur. Pour un peu, je lui passerais une ceinture d’explosifs rien pour qu’il sente ce que ça fait… – Oui, approuvent les deux compères. Il ne fait même pas Ramadan. Il croit que parce qu’il est en France, Dieu ne le voit pas. Il se trompe lourdement. Ils édictent leurs sentences le geste large et la voix haute à la façon de magistrats d’un tribunal islamique qui n’auraient aucune miséricorde dans leur verdict par contumace. Car ils bossent à l’abattage, les frangins ! A peine ont-ils décapité un impie que déjà, ils vouent à la géhenne le suivant puis encore le suivant, dans une spirale infernale… Naturellement, les mecs ratatinés sur leurs fauteuils dans l’attente de se faire coiffer sont silencieux. C’est un peu le public dans un tribunal. Il peut crier mais pas parler. Nous étions là, trois ou quatre à patienter, trois autres déjà sur le grill, à faire de la figuration même pas intelligente tandis que les mousquetaires mousquetaient tout ce qu’ils savaient. Ils se comportaient comme si nous n’étions pas là. Comme s’ils étaient seuls en quelque réunion secrète ! Mais non, nous sommes dans un salon… enfin un truc de coiffure pignon sur rue. Les coupeurs de cheveux se transforment sous nos yeux en coupeurs de têtes virtuels, seulement virtuels, du moins il faut l’espérer. J’en étais venu à me dire qu’il serait heureux que ce ne soient que des jobards, des mecs qui se la jouent, des fiers à bras, des grandes gueules… A 25 ans, on peut concevoir que le menu fretin qui leur tient lieu de vision du monde ne puisse pas prendre autre chose que des schématisations et des intolérances au yatagan. D’ailleurs, à un moment, le gourou avait évoqué les manifs américaines contre l’ouverture d’une mosquée non loin de Ground Zero. Il avait la solution : glisser parmi les manifestants un frangin bardé d’explosifs et l’envoyer au paradis dans le même vol que les amerlocks en partance pour l’enfer ! Radical ! Tu me diras que ce bavardage belliqueux est de la petite Malta devant la furie des actes des Afghans de la génération des années 1980. Ceux-là ne parlaient pas seulement. Ils agissaient sabre au clair et le résultat, on le connaît. Mais ce qui me surprend toujours, c’est ce discours de haine du monde entier et sans doute d’abord de soi-même, hérissé de violence, truffé de châtiments inédits, parsemé de mort et de deuil, dans lequel ils inhument leur raison. Je n’avais pas la force de les convaincre qu’à leur âge, ils avaient bien autre chose à faire qu’à surveiller qui fait Ramadan et qui ne fait pas la prière dans un pays qui n’est même pas musulman. Comment leur faire comprendre que si seulement ils avaient pu suivre leur propre orthodoxie, dans la discrétion que requiert l’intimité de la foi et dans l’humilité, ils auraient œuvré pour toute l’humanité. Comment les tirer de l’erreur de croire qu’en harcelant les autres on augmente la licité de sa propre pratique religieuse. Et avec quels mots leur expliquer qu’à leur âge, il est bien tôt de faire de la mort violente, à donner ou à recevoir, un sujet de tous les instants… J’étais tenté de leur conseiller, tant qu’à faire, les livres de l’ami Malek Chebel. Il sait parler de l’Islam dans la pulsion de vie… Mais dire tout ça à des citadelles me paraissait au-dessus de mes forces… Alors, je me suis tu et j’ai quitté le salon… pardon le truc de coiffure sans m’être fait couper les cheveux avec la certitude battant sous le cuir chevelu que le silence que je venais d’observer faisait partie de ces infimes particules qui, rassemblées, fourbissent les armes qui favorisent le choc des cultures de Hutington. Oui, tout ce qu’on ne dit pas sera retenu contre nous…
A. M.
P.S. 1 : Paul Nizan, catégorique dans Aden d’Arabie : «Je ne permettrai à personne de dire que 20 ans, c ‘est le plus bel âge de la vie». Pourtant… C’est l’âge des rêves et même des illusions… C’est celui du Soir d’Algérie dont l’enfance et l’adolescence ont été ponctuées par des coups de bombes, de feu, de semonce, de clairon… Et à tous les bruits de guerre, et ceux des deuils, se sont ajoutés le tintement des clochettes des juges et le cliquetis des menottes. Le Soir d’Algérie est une sorte de miraculé qui a 20 ans d’âge mais déjà la maturité de celui qui en a vu de toutes les couleurs. Comme pour tous les âges, ce qui compte, c’est de se tenir l’échine droite… Bon anniversaire, les potes, et une pensée pour ceux qui ont laissé leur vie pour que nous puissions encore respirer convenablement de la plume.
P.S. 2 : Cette chronique fait valoir in petto ses droits au congé annuel. Rendez-vous le 26 septembre.

Source de cet article :
http://www.lesoirdalgerie.com/articles/2010/09/05/article.php?sid=105488&cid=8

À propos de Artisan de l'ombre

Natif de Sougueur ex Trézel ,du département de Tiaret Algérie Il a suivi ses études dans la même ville et devint instit par contrainte .C’est en voyant des candides dans des classes trop exiguës que sa vocation est née en se vouant pleinement à cette noble fonction corps et âme . Très reconnaissant à ceux qui ont contribué à son épanouissement et qui ne cessera jamais de remémorer :ses parents ,Chikhaoui Fatima Zohra Belasgaa Lakhdar,Benmokhtar Aomar ,Ait Said Yahia ,Ait Mouloud Mouloud ,Ait Rached Larbi ,Mokhtari Aoued Bouasba Djilali … Créa blog sur blog afin de s’échapper à un monde qui désormais ne lui appartient pas où il ne se retrouve guère . Il retrouva vite sa passion dans son monde en miniature apportant tout son savoir pour en faire profiter ses prochains. Tenace ,il continuera à honorer ses amis ,sa ville et toutes les personnes qui ont agi positivement sur lui

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