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Hicham Aboud témoigne : « Kasdi Merbah a refusé de faire participer l’armée aux événements de Kabylie, comme il a refusé son limogeage de la tête du gouvernement »

4 septembre 2010

Histoire

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J’ai cité cet exemple pour démonter la guerre en sous-sol que Kasdi Merbah avait dû mener contre des hommes toujours à l’affût pour nuire à l’Algérie. Kesdi Merbah a travaillé dans l’ombre, sans jamais chercher à être connu ou reconnu, se consacrant corps et âme à faire d’un corps aussi sensible que le renseignement un outil de défense du pays aussi performant qu’actif.

 

  • Un homme, une oeuvre
  • 17 ans sont passés depuis la disparition du colonel Abdallah Khalef, alias Kasdi Merbah, assassiné le 21 août 1995, lui, son fils, son frère, son chauffeur et son garde du corps. En ce triste anniversaire, Hicham Aboud revient sur les réalisations de l’Algérie à l’époque où Kasdi Merbah était le premier responsable de la sécurité et de la stabilité du pays.«L’enfant du Djurdjura, Abdallah Khalef a rejoint le corps de sécurité le 31 décembre 1957, après avoir effectué une formation militaire de six mois, alors qu’il avait à peine 19 ans. Les 70 jeunes qui avaient pris part à cette même formation avaient été répartis sur les différentes régions de la Wilaya V. certains éléments du groupe, dont le défunt Kasdi Merbah, ont été affectés à l’organe de renseignements relevant du ministère de l’armement et des liaisons générales (MALG). Peu de temps après, en 1960, il prend les commandes du service des renseignements de l’Etat-major de l’ALN». 
  • Lucide et ingénieux
  • «Son habileté à mener les hommes et son ingéniosité dans l’évaluation des situations ont fait de lui la personne la plus qualifiée pour diriger la sécurité militaire en 1962. Sa direction se termine le 5 mai 1979, lorsqu’il est nommé secrétaire général du ministère de la défense nationale au cours du premier mandat présidentiel de Chadli Ben Djedid».«L’homme avait une profonde vision stratégique. Il a jeté les premiers jalons de l’organe de sécurité se basant sur sa longue expérience acquise durant la guerre de libération et sa participation en tant qu’expert militaire aux négociations de Rousse et d’Evian.Cette participation lui a permis de démasquer les intentions dissimulées de la France qui voulait garder la mainmise sur le pays. Pour contrecarrer de tels projets, Kasdi Merbah a œuvré pour que l’organe de sécurité soit solide et imperméable à toute tentative d’infiltration, en adoptant le principe de « pas de discussion » quelque soit la situation. Le défunt a interdit le recrutement des anciens de l’armée française et de ceux mariés à des étrangères. Même pour la génération de l’indépendance, il a éloigné ceux qui étaient apparentés à des français, des harkis, ou leurs sympathisants. Les portes de la sécurité militaire sont restées fermées devant tous ceux qui avaient des comportements troubles ou des antécédents judiciaires».«Si beaucoup de gens imaginent que les officiers de la sécurité militaire considérés comme l’élite du pays, vivaient dans l’opulence, c’était loin d’être le cas au moins jusqu’aux débuts des années 90. De nombreux officiers et officiers supérieurs souffraient de la crise du logement, logeaient dans des conditions difficiles au niveau des casernes et avaient du mal à économiser pour s’acheter un véhicule. Mais tous ceux qui ralliaient l’organe se sentaient honorés et étaient déterminés à servir la patrie en dépit des difficultés».«A l’époque de Kasdi Merbah, les renseignements algériens ont porté plusieurs coups durs aux renseignements français au cours d’une guerre secrète qui se poursuit jusqu’à présent. Impossible de l’oublier vu son impact sur la stratégie française. Le coup le plus sévère était la nationalisation des hydrocarbures annoncée officiellement le 24 février 1971 par le président défunt Houari Boumediene. Le choix du président Boumediene de dire « Nous avons décidé » n’était pas irréfléchi ou inconscient. Et il savait que la décision de nationaliser les hydrocarbures aurait un impact profond, non seulement sur la France, mais aussi sur tous les pays consommateurs de pétrole, se rappelant même la chute du gouvernement de Téhéran en 1953 lorsque pareille décision avait été prise. Ce qui a poussé feu Boumediene à annoncer avec beaucoup d’assurance la nationalisation des hydrocarbures, sans craindre le contrecoup de la France, c’est qu’il détenait toutes les informations concernant la réaction de l’Etat français. Il savait pertinemment que ce dernier n’oserait pas procéder à une attaque militaire contre l’Algérie. Ces informations lui avaient été fournies par le service de la sécurité militaire dirigé alors par Kasdi Merbah. Ce n’était pas le fruit de suppositions, mais les renseignements algériens avaient réussi à s’infiltrer aux fins fonds de l’Etat français et jusqu’au secrétariat général du Palais de l’Elysée, en envoyant pour cette mission l’officier Rachid Tabti».
  •  Infiltration algérienne de l’Elysée
  • «Le lieutenant Tabti avait infiltré le secrétariat général de l’Elysée après avoir séduit la première responsable du staff des dactylographes des rapports qu’envoyait alors le président français aux différentes institutions et organes de l’Etat. Il s’était fait passer pour un émir arabe, et la comblait de cadeaux. En contrepartie, il avait obtenu toutes les informations sur les intentions des responsables de l’Etat français au cas où l’Algérie viendrait à nationaliser ses hydrocarbures.
  • Cette infiltration est unique en son genre dans le monde arabe, puisque aucun service de renseignements arabe n’a jamais réussi un tel exploit, ni même moindre. C’était un travail de qualité et professionnel, suivi par d’autres réalisations comme l’infiltration du Mossad dans les années 80, à l’époque de Lakhel Medjdoub Ayat, par deux agents algériens au niveau des représentations des renseignements israéliens à Madrid et Marseille.
  • En revanche, les services secrets français ne sont pas parvenus à infiltrer les renseignements algériens. La dernière tentative en date, à ce que je sais, remonte au milieu des années 80 lorsqu’un sous-officier a été enrôlé, puis tout de suite démasqué par ses collègues. Il avait fui vers la France sans récolter la moindre information. D’ailleurs, son rang ne lui permettait pas d’être au courant des affaires importantes. Cet échec pousse encore les renseignements français à tenter par n’importe quel moyen d’infiltrer l’organe de sécurité algérien».
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  • «Pour arriver à leurs fins, les renseignements français œuvrent sur deux échelles. D’abord empêcher une quelconque infiltration de la part des services algériens, d’autant qu’en France, il y a beaucoup de français d’origine algérienne. Parmi cette catégorie, des éléments sont enrôlés pour surveiller étroitement la communauté algérienne établie en France. D’autre part, les services français tentent  d’infiltrer les institutions algériennes, particulièrement les institutions souveraines de l’Etat, en usant de différentes incitations. La France ne manque pas de continuer sa guerre psychologique contre l’Algérie en exploitant certains éléments qui vouent une aversion à l’institution militaire et son service de sécurité. En plus de la surveillance des associations qui accueillent les membres de la communauté algérienne, ainsi que les mosquées».
  • Une parenthèse 
  • «L’éditeur français François Gèze, est considéré comme un expert de la propagande ciblée contre l’Algérie, en particulier son institution militaire, par l’édition d’ouvrages plein de récits pour des ignorants incapables d’aligner deux phases correctes en français et encore moins en arabe, transformant le lâche en héros et le criminel passible d’un jugement en Algérie en opposant politique, même si ce dernier n’est pas au fait de la politique , ni de ses arcanes.
  •  Beaucoup s’étonnent de l’hostilité affichée de François Gèze contre l’Algérie et ses institutions. En fin de compte, Pierre Siramy, l’ex sous-directeur des renseignements français, la DGSE, l’a démasqué dans son livre « 25 années dans les services secrets » paru en mars dernier aux éditions Flammarion à Paris : « Le patron de la maison d’édition La Découverte, en l’occurrence François Gèze, travaille pour les services secrets » (voir le dernier paragraphe de la page 245). Et qui pourrait contredire ce témoin bien placé pour être au courant de tout du fait de son métier?
  • « Personnellement, j’étais conscient de cette vérité à partir de l’instant où François Gèze s’est intéressé à la publication de mon livre, « La mafia des généraux », paru en février 2002. Il a beaucoup regretté mes fins de non-recevoir à ses propositions et quand il s’est assuré que je n’étais pas de la même pâte que les auteurs qui se laissent dicter leurs écrits et dénigrent l’Algérie, malgré la dureté de mes critiques envers le système algérien, il était encore plus consterné. Mon livre n’attaque pas l’institution militaire, mais la défend et s’en prend à la cinquième colonne : ceci ne lui a pas plu. La déception fut à son comble quand le grand journaliste Anouar Malek a refusé de se plier à ses propositions alléchantes en 2006, malgré une situation très difficile ; il n’a pas tendu la main aux ennemis de l’Algérie et à leurs plans malveillants ».
  • François Gèze a reçu une gifle cinglante qu’il n’est pas prêt d’oublier par l’intermédiaire du commandant Bellazoug Abdelaâli, venu lui proposer d’éditer un livre dans sa maison d’édition. Après lecture, Gèze ne trouva pas le livre trop à son goût, et demanda à sa collaboratrice Salima Mellah, une française d’origine algérienne et au passé suspect, de lui en dire plus sur le livre. En fait, l’officier algérien qui avait déserté, n’était pas en France pour se jeter dans les bras du premier venu. Evidemment, il savait que le souhait de Gèze était de lui faire dire des choses contre l’armée algérienne, quitte à ce que ces choses n’étaient que rumeurs, commérages et affabulations.
  • François Gèze, qui pavoisait de sa rencontre avec Bellazoug Abdelaâli auprès de ses officiers traitant des services secrets, pensant avoir trouvé l’oiseau rare, pour lui faire dire toutes les énormités imaginables contre l’Armée. Mais en fait, il se trompait  lourdement, perce que Bellazoug n’avait aucun compte à régler avec l’armée : il avait déserté et quitté ses rangs parce qu’il avait des vues qui divergeaient avec sa hiérarchie militaire, mais il était un militaire qui aimait son pays, et ne tenait pas à perdre sa crédibilité en proférant des mensonges contre l’armée pour satisfaire ses détracteurs.
  • Ne se contentant pas de lui infliger pareil camouflet, en refusant de marcher dans de telles entourloupes, il avait aussi entamé une procédure en justice poursuivant Gèze pour non-respect des clauses, et avait eu gain de cause. C’était un autre échec pour Gèze après le procès que j’ai eu avec un de ses zélateurs, le journaliste Jean-Paptiste Rivoire, qui avait fabriqué une vidéo sur l’implication des militaires algériens dans les attentats parisiens de 1995, et que j’ai poursuivi en justice, déboursant de ma poche 3 000 euros, et n’exigeant pour dédommagements qu’un euros symbolique, pour lui donner une leçon sur la fierté et la dignité.
  • J’ai cité cet exemple pour démonter la guerre en sous-sol que Kasdi Merbah avait dû mener contre des hommes toujours à l’affût pour nuire à l’Algérie. Kesdi Merbah a travaillé dans l’ombre, sans jamais chercher à être connu ou reconnu, se consacrant corps et âme à faire d’un corps aussi sensible que le renseignement un outil de défense du pays aussi performant qu’actif.
  • Une montée fulgurante avant la fin de parcours
  • Le 5 mai 1979, il est désigné à la tête du secrétariat général de la Défense, puis vice-ministre de la Défense chargé des équipements militaires. Occupant dès lors des postes plutôt politiques que militaires, il est petit à petit connu du grand public. C’est à ce moment que je l’ai rencontré, alors que j’avais 24 ans seulement, pour faire avec lui un entretien à l’occasion du 25e anniversaire du déclenchement de la Guerre de Libération.
  • Les événements de Tizi Ouzou de 1980 ont précipité le départ de Kasdi Merbah du secrétariat général de la Défense nationale, pour le jeter à la tête d’un poste qui lui a été délibérément créé, certainement pour restreindre son influence dans les hautes sphères de l’Etat.
  • Etant lui-même Kabyle, natif de Beni Yenni, il refusa que l’armée prenne part aux événements de Kabylie, non pas parce qu’il était Kabyle, mais parce qu’il estimait que l’ANP n’était pas faite pour réprimer les manifestations et gérer l’ordre public. Il m’avait confirmé cela, en 1993, lors de ma dernière entrevue avec lui, pour les besoins d’un reportage sur le coup d’Etat du 19 juin 1965 et le rôle qu’il avait joué dans la réussite de ce putsch. Mais il y avait aussi une autre raison pour son éloignement du secrétariat général de la Défense nationale : en fait, une des ailes qui se battait pour la mainmise sur l’Etat avait pu convaincre le président Chadli Bendjedid que Kasdi Merbah se préparait à le déposer…
  • A partir de 1982, il est responsable de services techniques, situés très loin de la sphère des décisions politiques : il est tour à tour ministre de l’Industrie lourde pendant deux ans, puis ministre de l’Agriculture, puis ministre de la Santé, et dans tous ces postes, il laisse ses traces, ses décisions courageuses au profit de son secteur.
  • L’homme fort des services de renseignement algérien se retrouve soudain ministre, sans plus, avec des missions techniques plates, et presque personne ne se soucie de lui. Toutefois, de nouvelles donnes surgissent et Chadli Bendjedid le met à la tête du gouvernement. Là, ses adversaires, toujours à l’affût, ne tardent pas à réagir. Les événements d’Octobre 1088 surgissent et Merbah est placé par Chadli, qui n’a trouvé aucune issue, à la tête du gouvernement. Pour ceux qui misait sur le retour de l’Algérie au giron de la France, c’est une grosse déception, pire encore, un choc. Puis, peu à peu, à la faveur des ouvertures politiques, certains de ces adversaires avaient pu trouver la parade et trouver à redire, multipliant les attaques, jusqu’à faire venir un jeune de 25 ans et lui faire dire qu’il avait été torturé par Kasdi Marbah alors qu’il était responsable des services secrets. Le jeune était certainement en train de se sucer les doigts quant Merbah dirigeait le renseignement algérien, mais pour ces clans, tout était permis pour lui nuire.
  • Les attaques ne cessèrent que le dans la nuit du 9 septembre 1989, au bout d’un forcing monstrueux sur le président Chadli Bendjedid, et Merbah est alors destitué, et démis de ses fonctions. Le refus de Merbah de ce limogeage avait faillit faire basculer le pays dans le chaos, car Merbah se conformait aux textes constitutionnels pour démontrer la caducité constitutionnelle et juridique de ce limogeage. Les tentatives d’intercession ne donnèrent rien, et l’AFP publie le refus de Merbah d’accepter sa déposition…
  • Cette nuit-là, trois officiers de la Sécurité Militaire ont tenté de le faire revenir sur sa décision de se maintenir à la tête du gouvernement. Il les pria un à un de sortir de son bureau, puis, dans une attitude d’extrême sagesse, il se décida à partir… C’est lui-même qui me conta les détails de cette entrevue dans son bureau du parti « Majd », à Bouzaréah, quelques années plus tard.
  • Le 5 janvier, il reçu l’agrément pour créer son propre parti, le « Majd », et commença à faire de la politique…avant de partir, laissant derrière lui un héritage indéniable aussi bien sur le plan politique que sur le plan sécuritaire.

 

À propos de Artisan de l'ombre

Natif de Sougueur ex Trézel ,du département de Tiaret Algérie Il a suivi ses études dans la même ville et devint instit par contrainte .C’est en voyant des candides dans des classes trop exiguës que sa vocation est née en se vouant pleinement à cette noble fonction corps et âme . Très reconnaissant à ceux qui ont contribué à son épanouissement et qui ne cessera jamais de remémorer :ses parents ,Chikhaoui Fatima Zohra Belasgaa Lakhdar,Benmokhtar Aomar ,Ait Said Yahia ,Ait Mouloud Mouloud ,Ait Rached Larbi ,Mokhtari Aoued Bouasba Djilali … Créa blog sur blog afin de s’échapper à un monde qui désormais ne lui appartient pas où il ne se retrouve guère . Il retrouva vite sa passion dans son monde en miniature apportant tout son savoir pour en faire profiter ses prochains. Tenace ,il continuera à honorer ses amis ,sa ville et toutes les personnes qui ont agi positivement sur lui

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